Vous vous souvenez sans doute de Julie Victor que l’on voyait chanter et danser avec le groupe Ortal lors de l’Eurovision 2005.
Mais si, cette comédienne talentueuse qui a depuis prêté sa voix pour des publicités vantant les mérites nutritifs d’une barre de surimi ou bien encore le caractère très pratique de ce tampon hygiénique d’une absorption à toute épreuve ? Mais enfin, Julie Victor quoi !?
Non ? Bon, Julie Victor, c’est très justement parce qu’elle est un peu tous ces artistes qui ont galéré pour se faire connaitre et vivre de leur art qu’elle nous touche avec son humour un peu barré. Un conseil : courrez voir son spectacle : « Julie Victor fait ce qu’elle veut », vous ne le regretterez pas !
« Je me sens légère comme un castor qu’aurait gobé une mouche à bœuf ! »
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Lorsqu’elle arrive sur scène, elle explose littéralement et nous en met plein la vue. Julie Victor, c’est un peu le genre de nana très énervante qui sait tout faire : elle est canon, intelligente, elle est hilarante, elle chante super bien, bouge admirablement, danse à la perfection, imite quelques célébrités au passage et pourrait même, si elle s’en donnait la peine, vous cuisiner un chapon poché rôti l’air de rien. Mélangeant Stand Up, cabaret et récital, elle vous invite dans son monde et vous raconte par le début, son histoire qui commence très précisément en Normandie. Oui, vous avez bien lu, la Normandie, avec ses vaches et son Calvados.
« Les Parisiens pensent qu’on est, nous Normands, tous des alcoolos. Que tout le monde couche avec tout le monde ; si, si, la consanguinité je l’ai entendue ! Mais c’est dégueulasse de penser ça ! C’est scandaleux… on couche aussi avec des animaux… Attends, franchement, va passer un week-end à Alençon dans l’Orne aux confins de la Sarthe et de la Mayenne en plein mois de décembre par moins douze : le taureau, tu l’envisages ! »
L’occasion de découvrir une galerie de personnages loufoques, à commencer par la mère, monstre insensible qui lance des « bisous qui volent » et des « câlins de loin » ou bien encore un professeur de chant russe des plus tyranniques. Et puis c’est la révélation : Julie Victor veut être comédienne-chanteuse. Elle ne va d’ailleurs pas choisir, et on la comprend. Après un bref passage en Allemagne, elle atterrit à Paris dans un « très joli »7m³. S’enchainent les petits boulots qui permettent de joindre les deux bouts et les premiers pas dans un milieu artistique impitoyable. La publicité pour des canapés en cuir, les cours de théâtre et bien sûr, les rencontres.
« Hey les filles, pour manger moins, achetez de la vaisselle plus petite ! »
C’est en puisant dans son histoire personnelle que la performeuse nous livre un spectacle maîtrisé. Sorte de One Musical Show (c’était d’ailleurs le nom de son précédent spectacle), « Julie Victor fait ce qu’elle veut » prend le parti de ne pas choisir une forme fixe et mélange les genres. À la mise en scène, nous retrouvons l’hilarante et précise Tatiana Werner dont nous avions adoré le précédent spectacle « Le Nazi et le Barbier » adapté de l’auteur allemand Edgar Hilsenrath. À toutes deux, elles bâtissent un spectacle résolument moderne qui, tenu de bout en bout, ne s’essouffle jamais. L’occasion aussi de confirmer le talent de Julie Victor à incarner différents personnages : son imitation de Keira Knightley est à ce titre exceptionnelle. À l’accompagnement musical, Jérémie Pontier crée quant à lui un univers sonore cohérent et ponctue le « flow » de Julie Victor de respirations humoristiques et décalées bienvenues.
Hilarant autant qu’irrésistible, tout n’est pourtant pas parfait dans ce spectacle, notamment au niveau des enchaînements entre les personnages qui manquent parfois encore de précision. Mais c’est paradoxalement dans ces failles que le spectacle prend tout son sens : parce que ce dernier n’a de cesse d’évoquer en filigrane l’abnégation et le travail acharné d’une comédienne passionnée, il touche d’autant plus. Ainsi le spectateur ne se retrouve à aucun moment confronté à un show tout à la gloire et au savoir-faire de son interprète tourné, sorte d’exercice de style égocentré façon « regardez à quel point je suis si parfaite dans toute cette maîtrise que je dispense sur tout »mais partage bien au contraire le témoignage sincère d’une artiste besogneuse et vulnérable. Le spectacle gagne ainsi avec cette seconde lecture une finesse et une profondeur pertinente sans être pour autant lourd. En ce sens, le final est une vraie réussite.
Julie Victor JT TF1 par theatre10heures
En conclusion, « Julie Victor fait ce qu’elle veut » est un très joli spectacle qui mettra de belles couleurs dans votre hiver, celles d’un rire qui ne se prend jamais au sérieux.
A découvrir tous les mardis à 20h jusqu’au 31 mars au Sentier des Halles
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