La présence robuste du cinéma coréen dans la programmation de la 28e édition de L’Étrange Festival – six rien qu’en compétition officielle – permet de faire un tour du propriétaire des blockbusters récents en Asie orientale.

The Roundup © Metropolitan Film Export

La soirée d’ouverture commence en fun badass avec The Roundup de Lee Sang-Yong (2022), suite de The Outlaws et carton au box-office de son pays d’origine. Les flics coréens sont à la poursuite de compatriotes meurtriers au Vietnam, puis dans leurs propres frontières. Ça castagne sévère, avec le bruit des poings bien amplifié et une caméra qui ne tient pas en place. Il y a de vrais voyous qui en veulent, des flics déterminés, des mallettes et des rançons. Le film alterne comédie de buddy movie et scènes d’action impressionnantes en corps-à-corps. L’ensemble est bien évidemment cousu de fil blanc, mais procure de vrais shots d’adrénaline et un vrai plaisir de spectateur, dans un déferlement de violence graphique assez salvateur. Pour mettre dans l’ambiance sans trop cliver le public, le choix était bien vu.

Spiritwalker (c) Busch Media Group GmbH

Spiritwalker de Yoon Jae-Keun (2021), lui aussi en compétition internationale, fait partie de ces films à concept qui titillent la curiosité de tout amateur de genre : un homme qu’on cherche à tuer change de corps toutes les douze heures, y compris dans la peau des gens qui lui veulent du mal. Amnésique, il va recoller les différents morceaux grâce aux différentes personnalités dans lesquelles il s’incarne. Les deux premiers tiers, bien rythmés, tiennent en haleine grâce à une gestion haletante des changements d’identité et des indices récoltés sans temps mort. Lorsque les enjeux deviennent un peu plus concrets, le scénario prend le chemin des laïus explicatifs dispensables, doublés d’un formatage un peu lourd et impersonnel de l’action. Le film foule les plates-bandes de The Roundup dans sa vision du divertissement, en moins punchy toutefois.

SeoBok © Koba Films

Une structure très similaire irrigue SeoBok de Lee Yong-Ju (2021), présenté en sélection « Découverte Canal + ». Ici, un clone (le très touchant et hors-sol Park Bo-gum) est protégé par un ancien agent secret contre des organisations militaires et secrètes dans un road movie très mollasson et surtout trop mièvre. L’attachement au personnage se perd avec le manichéisme appuyé de l’ensemble, le cruel manque d’ambition du script et un discours peu limpide sur l’immortalité comme fardeau. Le réalisateur enfonce beaucoup de portes ouvertes – le lien à la mère, la quête de la rédemption –, si bien que les péripéties laissent pour le moins indifférent.

Life for Sale © Tom Teng

Pour sa part taïwanais, Life for Sale de Tom Teng (2022), en compétition, est fait du même bois. Le moule de la mafia, de la quête de vérité et de la poursuite, échoue quant à lui entièrement dans cette adaptation libre de Yukio Mishima. Dans une société où la mort peut se monnayer afin de payer ses propres dettes ou celles des autres, un jeune employé d’assurances accepte de mettre sa vie en vente après des tentatives de suicide infructueuses. Il va devoir aller récupérer un chien auprès d’un caïd local. Premier défaut de ce film : une voix off envahissante, qui freine sans arrêt la progression dramatique. Puis, le poussif mélange des genres n’arrive jamais à trouver le bon équilibre, la mise en scène ne va pas au bout de ses intentions, sans compter un rythme inerte et une romance guimauve invraisemblable. On aimerait défendre le pitch, qui paraissait prometteur, mais la mise en œuvre l’interdit. Dommage…

On a hâte de découvrir la suite de la sélection asiatique bien fournie de L’Étrange, pour se plonger dans une nouvelle école de spectateur au gré des cultures et des besoins de l’industrie cinématographique actuelle.

 

Voir aussi :
28e Étrange Festival – Compétition courts métrages #1
28e Étrange Festival – Compte-rendu 1

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