Entretien avec Charlotte Serrand- présentation de la quinzième édition du festival international du film de La Roche-sur-Yon (du 14 au 20 octobre2024).

Nous étions déjà présents l’an passé à La Roche-sur-Yon pour couvrir un festival qui,  sur une semaine, dans un cadre des plus agréable, offre une programmation associant éclectisme et qualité. Pour nous présenter l’édition 2024, sur laquelle nous reviendrons par la suite, nous avons eu le plaisir de nous entretenir avec Charlotte Serrand,  la déléguée générale et artistique du Festival.

Dans quelques jours  va s’ouvrir la quinzième édition du  F.I.F. (Festival international du film de La Roche-sur-Yon). Une longévité qui prouve que l’évènement a réussi a trouvé  sa place dans l’univers du cinéma. Pouvez-vous définir les  marqueurs de son identité, son ADN en quelque sorte ?

Le premier est qu’il s’agit d’un festival de cinéma international et généraliste, principalement dédié à l’actualité du cinéma contemporain. Il est vrai qu’en France les festivals généralistes ne sont pas légion. Le fait de se positionner sur ce créneau permet de faire une prospection large et très active dans le monde des images. Dans la création cinématographique contemporaine. Par exemple, on trouve autant le cinéma fantastique que le cinéma d’animation, que  la comédie… Il n’y a pas de contraintes de nationalités. Ni de durée, ainsi dans notre compétition Nouvelles vagues les courts-métrages sont éligibles au prix au même titre que les longs-métrages, il y a quelques années, Un Château l’autre, le court-métrage d’Emmanuel Marre avait été primé. L’autre particularité est sa dimension accessible. C’est-à-dire qu’on essaye de faire en sorte que chacun s’y retrouve, on est exigeant sur la qualité des films tout en incluant le public le plus large. Le tarif permet notamment cette inclusion, pour cinq euros on peut voir un film au festival et les rencontres sont en entrée libre ainsi que l’exposition. Troisième marqueur de notre identité, la rencontre entre les différentes disciplines artistiques. C’est notamment lié au fait qu’à La Roche-sur-Yon nous disposons de structures culturelles exceptionnelles. On peut collaborer avec la salle de concert, cette année c’est Irène Drésel. Le Grand R qui est scène nationale, pour le coté théâtre et littérature, avec qui nous co-organisons une rencontre sur l’adaptation littéraire au cinéma. Et le musée de la ville, avec lequel on développe depuis plusieurs années une exposition en lien avec le festival. Cela permet de riches explorations, cette année c’est Amir Zand, l’artiste iranien qui nous ouvrira son univers.

Tous les lieux de fêtes sont concentrés dans un petit périmètre, cela facilite les échanges.

Oui, vous faites bien de le signaler. C’est un atout indéniable. L’accessibilité est grandement facilitée. On circule très facilement d’un lieu à un autre, à pied ou à vélo. Cette année, le déménagement du Cinéma Le Concorde en plein centre-ville avec 4 salles (l’ancien cinéma était légèrement excentré) va faciliter encore plus les déplacements. Trois salles seront dédiées au festival, et on en garde une pour la programmation habituelle des sorties. Cela va permettre aux spectateurs de se rencontrer et susciter l’envie de découvrir de nouveaux films. Par ailleurs, les artistes sont très ouverts aux échanges avec le public. La programmation est organisée de façon à ce que les temps d’échanges ne soient pas contrariés par des plannings serrés.

Chaque édition est saluée par un public nombreux,  voire plus important  d’année  en année.  Le succès populaire est donc loin d’être incompatible  avec le choix d’une programmation exigeante en termes de qualité.  Quelles sont les « clés » de cette réussite ? 

En effet, le public du festival ne cesse d’augmenter. L’an dernier on a reçu près de trente mille spectateurs pour une ville d’un peu moins de 55.000 habitants. Je crois aussi qu’au fil des années il y une vraie complicité qui s’est créée avec le public. Une fidélité qui participe à ce nombre important. Cette année nous recevrons des invité.e.s appréciées du grand public, notamment Cécile de France, Reda Kateb qui vient présenter son premier long-métrage en tant que réalisateur. Et aussi Michel Hazanavicius, Audrey Diwan, Ariane Labed. C’est en venant rencontrer ces personnalités que le public se prend au jeu du festival et se trouve incité à faire de nouvelles expériences. Á prendre des risques en allant voir des films qu’il n’aurait pas forcement envisagés dans un autre cadre.

 

Quelles sont les actions qui sont mises en place pour susciter l’intérêt des différents publics, notamment des jeunes. Ayant eu la chance d’être présent l’an dernier, j’ai remarqué qu’ils étaient très présents lors des séances.

Tout au long de l’année il y a dispositif mise en place pour la jeunesse. Et, surtout, dans le cadre spécifique du festival  on propose aux jeunes, aux élèves de venir découvrir des films de la sélection. On a également un jury de lycéens qui décerne le prix Trajectoires parmi cinq, six films ciblés de la sélection. Il y a également une programmation dédiée au Jeune Public et aux familles.

 

Un tel festival  est une belle vitrine pour les films  présentés, leur permettre  de trouver des distributeurs ;  ce sont des missions essentielles  pour vous ? Est-ce que vous avez des exemples de belles réussites  initiées par le Festival ?  

Oui, car cela a toujours l’ambition du festival de faire découvrir des œuvres qui n’ont pas encore été diffusées en France. Et donc, le travail consiste à rechercher des films qui vont être découverts à la Roche-sur-Yon, pas forcément des films qui ont déjà un distributeur. Et, d’ailleurs, de plus en plus de distributeurs viennent au festival et découvrent des films. Il n’y a pas un marché du film proprement dit, mais nous sommes heureux de pouvoir contribuer au lancement d’une œuvre. Á titre d’exemple, Bénédicte Thomas d’Arizona Distribution a découvert Jonás Trueba au festival, avec Eva en Aout. Depuis elle continue à soutenir le réalisateur. Autres exemples, l’an dernier quatre films ont été vus par Norte Distribution, ils sont ensuite sortis au printemps 2024.

 

Dans tous les lieux où se déroulent les festivités, l’accueil est vraiment très  agréable ;  une ambiance conviviale et familiale participe au plaisir du spectateur. Les équipes de bénévoles occupent une place importante dans l’organisation.    

Oui, les bénévoles jouent un rôle important, et ils sont entre 100 et 150 chaque année. Mais pas seulement eux, il y a une véritable synergie entre les équipes qui font partie de l’organisation : l’équipe du festival, l’équipe du cinéma, celle de la ville, celle du musée… une complicité s’est installée entre toutes ces entités.

 

Quelles sont les points forts de cette quinzième édition ?

On a déjà parlé de la nouvelle salle de cinéma, mais ce sont surtout les films qui sont les temps forts, avec environ 40 premières françaises. Les rencontres avec les invités seront certainement des moments importants mais pour moi tous les moments sont des temps forts et ont leur spécificité et j’invite vraiment à se plonger dans le programme. Par exemple, on aura la chance de pouvoir découvrir le très beau documentaire Made in England: the films of Powell and Pressburger de David Hinton, raconté par Martin Scorsese, et ce sera l’une des rares occasion de voir le film en salles car le film n’est sorti qu’en ligne. C’était l’occasion de reprogrammer des films de Powell and Pressburger. En plus des nouveaux films, on va renouer avec l’histoire du Cinéma : la réouverture de la programmation Passé-Présent va permettre de diffuser des films du patrimoine qui viennent d’être restaurés, également en première française. Autre point fort, l’équilibre entre les nouveaux films d’auteurs déjà connus – le dernier film de Lav Diaz ou celui de Walter Salles-  et les premiers films. Parmi les premiers films, je pense notamment à Pierce de Nelicia Low,  réalisatrice singapourienne qui a été primée au Festival de Karlovy Vary.

 

Que peut-on vous souhaiter pour cette édition et pour les années futures ?

Que le public continue à être au rendez-vous et que la flamme du cinéma continue de briller.

 

Entretien réalisé par téléphone le jeudi 26 septembre. Merci beaucoup à Charlotte Serrand pour sa gentillesse et sa disponibilité. Un grand merci également à Estelle Lacaud, l’attachée de presse du festival qui a organisé cette interview.

Lire également notre retour sur cette quinzième édition.

 

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A propos de Jean-Michel PIGNOL

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