Exclu ! Lancement de la sélection Annuelle 2021 du Groupe Ouest : Les Lauréats. 

Situé à Plounéour-Brignogan dans le Finistère, le Groupe Ouest est un FilmLab européen, c’est-à-dire une résidence à laquelle participent les auteurs/artistes de 8 projets  durant 9 mois.

Pour la 15e année consécutive, le Groupe Ouest renouvelle donc cette formidable aventure qu’ont vécue plusieurs figures majeures telles László Nemes, Pablo Agüero, Houda Benyamina, Lukas Dhont, Olivier Loustaud, Maïmouna Doucouré, Massoud Bakhshi, Julien Lilti, Alice Vial. (La liste complète est ici)

L’une des particularités du Groupe Ouest est d’organiser cette résidence autour du « Raconte-moi », de petites vidéos de 5 minutes que tourneront régulièrement les auteurs au fil de leur séjour. L’occasion pour chacun de présenter à ses camarades de résidence la version de son scénario saisie à l’instant T. Ainsi, au fil des épisodes, les « Raconte moi » retracent-ils l’évolution du projet, jusqu’au dernier « Raconte-moi », probablement le plus proche du résultat final.

Et cette année, résidence rime avec résistance. Au-delà de l’événement, le Groupe Ouest opère un acte quasi-militant en proposant une édition présentielle, avec toutes les mesures sanitaires qui s’imposent et en ayant obtenu les dérogations nécessaires. Ils seront tous là, en chair et en os, à interagir les uns avec les autres, à échanger, à regarder leur projet naître et prendre forme. Ce lieu d’échange, berceau de création, est donc quelque part l’une des plus belles preuves de vie en cette période dominée par la peur. Ils auront la mer, les récifs, le vent et leur harmonie collective pour s’inspirer durant ces quelques mois.

Voici donc en exclusivité les lauréats de cette édition 2021 :

Khalil Cherti pour Zineb, Reine du désastre
Julien & Simon Dara pour My road
Marie Le Floc’h pour Les exilés meurent aussi d’amour
Bérangère Mc Neese pour Immaculées
Jonathan Millet pour Les fantômes
Martin Soudan pour Quatre Août
Çağla Zencirci & Guillaume Giovanetti
pour Chen & Gan
Marina Ziolkowski & Luli Barzman
pour Destination Rose Bonbon

Pour en savoir plus sur leurs projets, connectez-vous au site du Groupe Ouest.

 

Çağla Zencirci & Guillaume Giovanetti, dont nous avions adoré Sibel, nous ont justement accordé un petit entretien à propos de leur nouveau projet, Chen & Gan. 

Pourquoi avoir postulé au Groupe Ouest ?

Guillaume : Parmi les nombreuses raisons possibles, être dans le cadre d’une émulation avec des gens qui ont une richesse à partager, quel que soit le niveau d’expérience, c’est toujours bien, lorsqu’on est en train d’écrire un scénario. Ça n’est pas notre premier long-métrage, mais pour tous nos films, on s’est toujours retrouvés à un moment ou un autre dans le cadre d’une résidence ou d’un atelier. On aime ça et ça nous tire vers le haut.

Çağla : tout à fait, et dans la situation actuelle, comme tout est annulé, nous faisions vraiment confiance au Groupe Ouest pour qu’eux, continuent à faire le boulot qu’ils font si bien. Et en 2015 nous avions eu la chance, dans le cadre du TorinoFilmLab où nous étions en train d’écrire un scénario, de passer une semaine avec le Groupe Ouest et nous avions beaucoup aimé le lieu.

Guillaume : dans le contexte actuel, la situation évolue de façon dramatique au niveau sanitaire, professionnel, culturel et par la force des choses nous sommes tous isolés les uns des autres. Il faut lutter contre ça, être en contact avec les gens qui vivent la même situation que nous pour ensuite avancer ensemble, prendre des décisions ensemble, s’interroger sur comment fabriquer un film dans ce contexte-là, comment les montrer, également. Le laboratoire du Groupe Ouest pouvait donc s’avérer pertinent.

Çağla : nous avons fait plusieurs résidences un peu partout dans le monde. C’est salvateur de se retrouver avec des personnes qui vivent la même chose que nous, ça nous ouvre d’autres fenêtres, ça crée une forme de brainstorming qui aide les projets à avancer.

Guillaume : et cela ne s’arrête pas au temps de la résidence. Nous sommes restés en contact par exemple avec les gens que nous avons rencontrés pendant notre première résidence en 2006 au Moulin d’Andé en Normandie. Nous avons suivi l’évolution des films qu’ils ont faits.

Pourquoi cette importance de revenir au présentiel ?

Çağla :  c’est juste irremplaçable. Là nous sommes en train de nous parler (NDLR : l’entretien s’est fait par Zoom). Mais physiquement nous sommes juste en train de regarder notre écran. Nous aurions aimé être ensemble dans un petit café ou bien chez nous… Nous en avons vraiment besoin, pas vraiment d’être en contact physique mais d’être face à face avec les gens.

Guillaume : très honnêtement, nous ne pensions pas que le premier atelier du Groupe Ouest allait se dérouler en présentiel. Quand ils l’ont annoncé, qu’ils nous ont informés de toutes les mesures prises dans le cadre de la crise sanitaire on s’est dit que c’était super. Il faut qu’on vive avec cette situation, qu’on trouve des solutions. Ne pas bouger, un an, deux ans, trois ans en attendant que les choses se passent ça n’est pas envisageable tant au niveau psychologique qu’économique. Alors que les news anxiogènes se poursuivent, que la situation ne s’améliore pas, c’est super que le Groupe Ouest prenne ça à bras le corps, voilà un geste courageux. Rien que pour cela, nous revenons d’Istanbul pour faire le présentiel !

En quoi le « Raconte-moi » du Groupe Ouest vous paraît intéressant dans votre processus créatif ?

Çağla : nous sommes assez habitués à cet exercice, c’est d’ailleurs une chose que les institutions demandent beaucoup aux réalisateurs. A partir du moment où l’on commence à réfléchir au projet et à essayer d’en transmettre l’idée de base, quand le Groupe Ouest nous demande un « Raconte-moi » nous sommes obligés de le rendre concis et de le raconter dans le temps qui nous est imparti. Et quand on le raconte à quelqu’un, plus encore à des professionnels qui savent juger d’un traitement, d’un sujet, d’un synopsis, il est indispensable d’utiliser toutes les armes possibles pour traduire le contenu et le but, de convaincre la personne en face de nous que nous voulons mener ce projet à son terme. Un « Raconte-moi » sert à faire comprendre pourquoi on tient autant à notre projet et pourquoi on ne le lâchera pas.

Guillaume : pour la candidature nous avons filmé le premier, ici sur le toit de l’immeuble à Istanbul. Et nous devons en livrer un nouveau d’ici mardi. Justement, entre temps, le projet sur lequel nous avons travaillé a évolué, les personnages sont déjà plus aboutis, il y a une fin différente… Refaire le même exercice qu’il y a trois ou quatre mois va nous permettre d’identifier les points clés de notre narration. C’est aussi bien pour les auditeurs du « Raconte-moi » que pour nous, qui structurons notre pensée au fur et à mesure des étapes de l’écriture du scénario. On pourra faire un montage des différents « Raconte-moi » pour constater l’évolution et on va bien s’amuser !

Çağla : typiquement, la première version de Sibel était un western ! Le projet évolue parce que nous évoluons nous aussi entre temps !

Pouvez-vous nous parler de Chen & Gan ?

Guillaume : comme tous nos films, ce sera un film de rencontre. Entre deux personnages très opposés, une femme qui tient un foyer pour femmes violentées sur une île au milieu du Bosphore, ancienne athlète d’arts martiaux, et un rom d’une communauté tzigane d’un quartier d’Istanbul, alors que la sœur du jeune homme, refusant de se marier, s’est réfugiée dans le foyer. Ce sera un film très coloré sur ces deux communautés, sur la ville d’Istanbul aussi, et très romanesque. Ce sera un film plus ambitieux que les précédents.

Allez-vous installer cette atmosphère si caractéristique de votre cinéma, d’entre-deux, de frontière, de fantastique qui s’insère dans le quotidien ?

Çağla : oui, comme dans Sibel ou nos autres films, à un moment donné nous touchons aux mythes, aux histoires anonymes, nous adorons travailler là-dessus.

Guillaume : sur chacun de nos projets, nous travaillons en commençant toujours dans la réalité pour aller ailleurs, comme nous aimons qu’on nous raconte des histoires pour qu’ensuite nous puissions à notre tour raconter la nôtre. Nous essayons toujours de trouver un équilibre entre le réalisme et les contes, les mythes. Et notre film ne fera pas exception.

© Brigitte Bouillot

Laissons le mot de la fin à l’un des piliers du Groupe Ouest, Charlotte Le Vallégant, co-directrice du Groupe Ouest :

Définir le Groupe Ouest
« Le Groupe Ouest est tout d’abord un lieu créé pour les auteurs, et par les auteurs. Très souvent, les lieux dédiés au travail d’écriture pour le cinéma et l’image en mouvement de manière plus générale sont souvent le fruit d’une volonté politique et institutionnelle, il faut bien le dire, dans une caricature de la centralisation française. Nous avons au contraire ce rapport d’artisanat avec les artistes et les auteurs qui ont conçu ce lieu dans une volonté farouche de décentralisation. Pour nous, l’idée était donc de créer un ailleurs. Nous croyons beaucoup en l’idée que le lieu où l’on se trouve influence notre manière de penser. Donc il s’agissait de permettre à des cinéastes de tous horizons de trouver un endroit où leur vision du monde puisse être portée par ce territoire géographique fort et puisse être accompagnée, stimulée, renforcée par des scénaristes consultants expérimentés. »

La couleur de cette nouvelle édition

« Majoritairement on a affaire à des premiers films, à des premiers long-métrages de jeunes cinéastes qui ont déjà fait leurs preuves dans le format court sur leur capacité à nous embarquer dans un monde, à nous faire traverser des émotions. Lorsque nous opérons la sélection, cela nous tient très à cœur de parier sur des cinéastes qui en ont sous la pédale dans leur démarrage de carrière, qui veulent passer au long-métrage ou, pour ceux qui ont déjà fait un long-métrage, qui veulent se lancer d’autres défis et abordent des problématiques très contemporaines et variées. Nous avons reçu 270 projets.

Lorsque nous faisons une sélection de 8, il est important que les auteurs expriment un besoin d’être accompagnés dans l’élaboration du récit, qu’ils aient cet appétit de faire un cinéma porté par une histoire, qui puisse toucher des spectateurs et s’adresser à autrui pour véhiculer du sens et transmettre leur vision du monde. Il est essentiel que nous puissions dessiner une palette de nuances dans ce cinéma que nous allons aider à grandir, dont nous allons aider le façonnage. »

Le retour au présentiel

« L’épidémie était déjà là pour la sélection 2020 et nous n’avions rien annulé. Nous avons réussi à passer entre les gouttes pour la session de juin et sur la session d’octobre, il y a eu présentiel et distanciel. Nous nous situons dans un des endroits les plus verts de France, dans un village occupé majoritairement par des gens de plus de 65 ans. Et pour nous il est extrêmement important à la fois d’accueillir des cinéastes ici et de préserver les gens avec lesquels on vit. On a donc trouvé une solution qui nous semble allier la prudence et le principe de réalité : l’Hôtel de la Mer de Plounéour-Brignogan, actuellement fermé au public mais en droit d’accueillir des séminaires, permettra aux auteurs de travailler dans un endroit absolument magnifique en respectant toutes les distances. Nous avons mis en place un projet sur mesure pour honorer la première session en présentiel, avec certes beaucoup de conditions, mais c’est quand même du présentiel.  C’est une tentative. Il va falloir à un moment donné apprendre à vivre avec ce qui nous arrive.  Nous allons aussi tester l’autodiscipline. Pour le moment, que ce soit les auteurs ou les scénaristes consultants, tous jouent le jeu. Nous sommes vraiment en train d’expérimenter un nouveau mode de fonctionnement, très différent pour nous qui avions l’habitude de voir tout le monde hébergé dans des gites, à plusieurs, dans des espaces collectifs assez restreints. Nous avons repensé toute l’approche organisationnelle pour offrir aux auteurs cette respiration devenue aujourd’hui fondamentale, un bain nécessaire d’interactions humaines. »

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A propos de Olivier ROSSIGNOT

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