Pour découvrir la nouvelle édition de l’ Amnesty Film Festival, nous avons eu le plaisir de nous entretenir avec Ivan Guibert, l’un des deux programmateurs et coordonnateurs de l’évènement.
C’est la quatorzième édition du festival, signe du succès de cette initiative. Pouvez-vous nous rappeler en quelques mots les objectifs du festival ?
Il y a deux objectifs principaux. Le premier est de montrer des œuvres convergentes avec les campagnes qui sont en cours chez nous ; nos deux axes essentiels étant la défense des libertés et la lutte contre les discriminations. Le deuxième consiste à réaliser un état des lieux des droits humains sur la planète par le prisme de la création cinématographique. Un angle qui diffère de nos moyens habituels que peuvent être les rapports, les conférences, les évènements… On a envie que le public soit touché par des films esthétiquement réussis. Nous sommes animés par une volonté de partage.
Y-a-t-il des nouveautés, des changements dans la formule pour cette année ?
Beaucoup de nouveautés cette année. On a changé les objectifs. Si on a toujours un désir de visibilité, réunir le plus grand nombre de spectateurs, on a également décidé de développer les relations publiques avec le monde du cinéma. De faire venir les personnalités de cet art pour qu’ils échangent avec le public. Pas seulement pour parler des films projetés, mais pour aborder des problématiques en lien avec la diffusion, ex : samedi 3 février, suite à la projection du film Avant que les flammes ne s’éteignent (Mehdi Fikri, nous organisons non pas un débat sur les violences policières qui est le sujet du film mais un débat plus large sur les films en danger. Ceux qui sont victimes d’une campagne de dénigrement sur les réseaux sociaux. Un phénomène apparu il y a maintenant trois quatre ans et qui s’amplifie aujourd’hui. Notamment sur des films que l’on soutient. Des mécaniques sont mises en place, comme celle de faire baisser les notes sur AlloCiné. Nous avons également changé la salle qui nous accueille, en optant pour Le Luminor nous augmentons notre capacité d’accueil, on passe à 180 places. On a également changé les dates, on passe de novembre à février.
Les Filles d’Olfa: Copyright Tanit Films
Durant ces trois jours, sept films seront présentés au public, comment les avez-vous sélectionnés ? Il a fallu choisir parmi une multitude de films car le cinéma contemporain est très préoccupé par les enjeux sociaux, économiques et politiques.
Pendant longtemps, on s’est focalisés sur le fait de présenter des films en avant-première. Même si cette année la sélection en compte trois, ce n’est pas le critère le plus important pour nos choix. On sélectionne des films qui ont déjà une certaine notoriété, auprès des cinéphiles et du public en général. C’est le cas pour Les Filles d’Olfa (Kaouther Ben Hania) qui sera présenté le dimanche 4 en début d’après-midi. Ce film a attiré l’attention lors de sa sortie il y a quelques mois. Pour ce film comme pour l’ensemble de la sélection, ce n’est pas uniquement la thématique qui guide notre choix, mais les qualités de mise en scène.
Pour répondre à la deuxième partie de votre question, je ne sais pas s’il y a plus de films politiques et sociaux aujourd’hui par rapport à d’autres époques, comme les années soixante-dix, mais, quoi qu’il en soit, ce qui est sûr c’est que le cinéma s’empare abondamment de ces thématiques. Dans les sélections cannoises, il y a bien un tiers de la programmation qui nous intéresse. C’est aussi le cas pour la Berlinale.
Dans la société actuelle où les réseaux sociaux sont de plus en plus un référent en termes d’opinion, Amnesty International croit encore au pouvoir du cinéma pour promouvoir certaines valeurs, quel peut être encore l’impact de ce média ?
On est encore sur des bonnes fréquentations dans les salles. Après la sortie du COVID on a connu une baisse inquiétante, mais, progressivement on a assisté au retour des spectateurs. Plus que les réseaux sociaux, c’est la montée des plateformes qui suscitent des questions. Mais c’est un média consommé individuellement, il n’y a pas encore la possibilité de débats collectifs après les diffusions. Peut-être dans le futur ? Le cinéma reste un vecteur dans lequel on s’investit, en créant des dossiers d’accompagnement des films ainsi qu’en organisant les débats qui suivent les projections. En ce qui concerne les réseaux sociaux, on a une équipe spécialisée qui travaille sur cet univers où la communication est évidemment très importante.
D’une façon plus large, quels sont les liens qu’Amnesty International entretient avec le cinéma ?
Le cinéma est un levier essentiel pour parler de nos sujets. Il nous permet d’aborder les dimensions émotionnelles des causes que l’on défend. Tout au long de l’année on effectue un travail de recherche pour repérer en amont les films que l’on va accompagner dans le cadre de nos ciné-débats. On effectue une veille sur l’actualité cinématographique via des revues spécialisées comme Le film Français et on se déplace également dans des Festivals : Cannes, Berlin, Venise. Ainsi, au total, on soutient une dizaine de films par an. Moi capitaine (Matteo Garrone), par exemple. Je vous invite à consulter notre site pour découvrir la liste. Aujourd’hui on travaille avec des distributeurs bien implantés comme Le Pacte, Diaphana, Bac Films… On a également des liens étroits avec le cinéma au travers des festivals organisés localement par nos militants. Nous sommes très actifs dans le domaine.
Entretien réalisé par téléphone le vendredi 26 janvier. Merci à Ivan Guibert pour avoir répondu à nos questions. Merci à l’équipe de l’agence Valeur absolue, et plus particulièrement à Julie Slota stagiaire/ attachée de presse, pour avoir organisé cette interview.
Temps forts
Vendredi 2 févier :
20H00 : Green Border d’ Agnieszka Holland. La projection sera suivie d’un verre d’ouverture.
Samedi 3 février :
14h00 – Avant que les flammes ne s’éteignent de Medhi Fikri, projection suivie d’une table ronde « Films en danger »
17h00 – Pierre Feuille Pistolet De Maciek Hamela, projection suivie d’une rencontre
20h00 – Orlando, ma biographie politique de Paul B. Preciado, projection suivie d’une rencontre.
Dimanche 4 février 2024
14h00 – Les filles d’Olfa de Kaouter Ben Hania, projection suivie d’une rencontre.
17h00 – L’Amour et les forêts de Valérie Donzelli, projection suivie d’une rencontre avec la réalisatrice.
20h00 – Soirée de clôture avec Chroniques de Téhéran. Film de clôture suivi d’un cocktail.
Programme détaillé sur le site du Festival.
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