Huitième collaboration de Billy Wilder avec son scénariste I. A. L. Diamond, Avanti! est aussi le dernier contrat du réalisateur avec la Mirisch Compagny, qui ne produira plus beaucoup de films entre les années 1970 et 1980.
Petite pépite méconnue, Avanti! est LA comédie italienne de Wilder, qui sait incontestablement tirer parti du décor paradisiaque l’île d’Ischia, et des talents de son comédien fétiche Jack Lemmon, pour insuffler rythme et impertinence à une intrigue qui a pour thème principal le deuil. Wendell Armbruster Jr. (Jack Lemmon) débarque sous un soleil insolent et un ciel azur, afin de rapatrier en Amérique le corps de son père, mort dans un accident de voiture. Mais c’est sans compter la rencontre de Wendell avec Pamela Piggott (Juliet Mills), dont la mère est précisément morte dans un accident de voiture, aux côtés de l’homme qu’elle aimait. Wendell comprend alors que son père, qui prétextait un séjour sur l’île pour des bains de boue, entretenait en fait une liaison avec feue Mrs. Piggott, ce qui n’est pas pour arranger ses affaires.
Placer la rencontre entre les deux personnages principaux durant le trajet en bateau pour Ischia permet de fonder l’intrigue sur une mésentente initiale qui n’aura de cesse de nourrir les malentendus et disputes à venir. Wendell surnomme Pamela « grosses fesses », laquelle a bien du mal à tenir son régime mais est tout ébaubie à l’idée que sa mère ait pu vivre une romance hors des sentiers battus. Le regard candide de Pamela aura donc raison de l’acrimonie de Wendell et les deux personnages trouveront un singulier moyen de célébrer la mémoire des défunts.
L’intrigue se déroule principalement dans le somptueux Hôtel Excelsior, où défile un personnel pittoresque, allant du directeur arrangeant au valet de chambre perfide, en passant par la servante intrigante. Cette savoureuse galerie de personnages rappelle qu’Avanti! est avant tout l’adaptation d’une pièce de Samuel A. Taylor. Mais les codes théâtraux s’effacent habilement au gré des échappées hors de l’hôtel et des scènes en extérieur, qui apportent une amplitude de champ à la mise en scène filmique. En effet, l’île d’Ischia est merveilleusement mise en valeur, dans son indolence contrastant avec les buts d’un Américain pressé, PDG de son état, venu expressément rapatrier la dépouille paternelle et préparer l’hommage solennel qui lui sera rendu devant la bonne société.
Billy Wilder n’a pas son pareil pour fissurer les bienséances et instiller la critique et l’ironie à l’égard du puritanisme. À cet égard, la comédie sera amoureuse et hédoniste, l’amour prenant le pas sur le deuil compassé. Les cadavres disparaissent, la mafia s’invite dans les étages de l’hôtel, les mets délicats brisent l’austérité, et les corps se dénudent – dans un contexte propice à une baignade dans le plus simple appareil. Cet aspect subversif ne le cède pas à la délicatesse, car dans la comédie de situation affleurent les failles psychologiques des personnages. Si Jack Lemmon et Juliet Mills forment un duo rocambolesque de personnages mal assortis, ils sont fort émouvants par leur maladresse respective et, surtout, leurs réactions sont souvent inattendues, ce qui fait que leur relation ne s’établit pas sur des rouages convenus.
Enfin, la force du film réside aussi dans la critique des classes sociales et la satire des puissants, avec la sympathie particulière dont les films de Billy Wilder témoignent à l’égard gens modestes. Et si Avanti! passe pour un film mineur, c’est à tort, car il est loin d’être aussi lisse et anecdotique qu’on le dit. Assurément, il gagne à être redécouvert, non seulement pour sa fraîcheur et sa légèreté mais aussi pour son efficacité dramatique.
DVD -Blu Ray Rimini Éditions – durée 2h23
Date de réédition : mars 2020
© Tous droits réservés. Culturopoing.com est un site intégralement bénévole (Association de loi 1901) et respecte les droits d’auteur, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos visibles sur le site ne sont là qu’à titre illustratif, non dans un but d’exploitation commerciale et ne sont pas la propriété de Culturopoing. Néanmoins, si une photographie avait malgré tout échappé à notre contrôle, elle sera de fait enlevée immédiatement. Nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur – anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe.
Merci de contacter Bruno Piszczorowicz (lebornu@hotmail.com) ou Olivier Rossignot (culturopoingcinema@gmail.com).