Sommité de la cinéphilie française, Christophe Gans est désigné à vingt-deux ans rédacteur en chef de Starfix, après avoir fait ses études à l’IDHEC. Mensuel créé par les fondateurs de la société d’édition Scherzo Vidéo, son comité de rédaction comprend notamment Nicolas Boukhrief, Doug Headline et François Cognard. Ensemble, ils défendent des auteurs tels que David Cronenberg, John Carpenter, Dario Argento ou John Woo, alors malmenés ou ignorés par la critique institutionnelle. Gans anime également une rubrique consacrée au septième art au sein de l’émission Rapido d’Antoine de Caunes avant de créer en 1997 la revue HK Magazine, focalisée sur le cinéma asiatique. HK devient également éditeur de VHS puis de DVD, contribuant à faire découvrir tout un pan de cette culture en France. Héritier nouvelle génération de Jean-Pierre Dionnet, il va peu à peu tenter de se faire une place en tant que réalisateur. Vers la fin des années 80, il rejoint l’équipe de Samuel Hadida et commence à travailler sur plusieurs scénarios. Il réalise en 1993, aux côtés de Brian Yuzna et Shu Kaneko, un segment du film d’horreur à sketchs Necronomicon, inspiré de l’œuvre d’H.P. Lovecraft. Deux ans plus tard, il signe son premier long-métrage, Crying Freeman, adapté d’un manga, qui lui permet de faire ses armes tout en rendant hommage aux productions hongkongaise qui l’ont bercé. Joli succès, ce coup d’essai marque sa rencontre avec Mark Dacascos, son alter ego, qu’il aime à dépeindre comme « son Bruce Lee », idole de sa jeunesse. Renforcé par ces débuts réussis, il se lance dans un projet ambitieux visant à raviver le film d’aventures des années 60 : la mise en scène d’une préquelle de Vingt Mille Lieues sous les mers de Jules Verne, centrée sur les jeunes années du Capitaine Nemo. En 1999, après deux ans de préproduction au cours desquelles il a notamment collaboré aux côtés de Marc Caro, Roger Avary et l’auteur de bandes-dessinées Mathieu Lauffray, des différends avec les financiers britanniques le poussent à abandonner. Il s’intéresse alors à un script intitulé Lupus Dei (croisement entre lupus, loup en latin et l’Opus Dei) d’un certain Stéphane Cabel, essentiellement identifiable pour avoir œuvré sur la série Le Monde secret du Père Noël et participé à l’écriture d’Un pur moment de rock’n roll. Le jeune scénariste fasciné par l’histoire de la bête du Gévaudan, a imaginé un hybride croisant le film de monstre, de cape et d’épée, le thriller politique et, de son propre aveu, le hip-hop : « J’aimais bien cette musique à l’époque. Je me suis dit que j’allais faire comme tous ces mecs qui samplent, mettre tout ça ensemble et voir ce que ça donne. » (1). Initialement proposé à un Laurent Boutonnat encore affecté par l’échec de Giorgino, qui tarde à donner sa réponse, Le Pacte des loups, de son titre final, est confié à Christophe Gans. Ce dernier retravaille le scénario afin d’y apposer davantage sa vision et s’entoure des producteurs Samuel Hadida et Richard Grandpierre pour concrétiser ses désirs.
En 1766, une bête mystérieuse sévit dans les montagnes du Gévaudan et fait de nombreuses victimes, sans que quiconque puisse l’identifier ou la tuer. Les gens ont peur. C’est un monstre surgi de l’enfer ou une punition de Dieu. L’affaire prend rapidement une dimension nationale et porte atteinte à l’autorité du Roi. Le chevalier Grégoire De Fronsac (Samuel Le Bihan), naturaliste de surcroît, est alors envoyé dans la région du Gévaudan pour dresser le portrait de la bête. Bel esprit, frivole et rationnel, il est accompagné de l’étrange et taciturne Mani (Mark Dacascos), un indien de la tribu des Mohawks. Ces derniers s’installent chez le Marquis Thomas d’Apcher (Jérémie Renier). Au cours d’une soirée donnée en son honneur, Fronsac fait la connaissance de Marianne De Morangias (Emilie Dequenne) ainsi que de son frère Jean-François (Vincent Cassel), héritiers de la plus influente famille du pays. Fronsac se heurte bientôt à l’animosité des personnages influents de la région.
Anomalie au cœur de l’industrie française, Le Pacte des loups sort en janvier 2001 sur sept-cents copies et réunit un total impressionnant de plus de cinq millions de spectateurs, accompagné de très bons scores sur la scène internationale. Un succès en guise de délivrance pour une œuvre iconoclaste à la longue gestation. Le scénario de Stéphane Cabel fut développé à l’intérieur du pôle Canal + Écriture, une structure ayant pour objectif d’apporter aux jeunes auteurs une aide financière et artistique, mais surtout de développer des projets atypiques. Auparavant, elle a permis à Bernie d’Albert Dupontel, Dobermann de Jan Kounen ou Train de vie de Radu Mihaileanu, de prendre vie. Lancée en 1995 sous l’impulsion d’Alain de Greef, elle fait la part belle aux anciens de Starfix, les têtes pensantes de l’époque, Christelle Brieussel et François Cognard ayant succédé à Nicolas Boukhrief et Richard Grandpierre. En 1998, sous l’initiative de Pierre Lescure et la houlette de Brahim Chioua, Canal + Écriture devient Eskwad, un département de Studiocanal amené à entrer en coproduction avec d’autres sociétés. Grandpierre en prend les rênes et va devenir l’un des chefs de file du cinéma de genre hexagonal. Il a déjà produit Comme un aimant et Les Morsures de l’aube, il travaillera par la suite sur Irréversible, Saint Ange, Le Convoyeur, Ils, Enfermés dehors, Dante 01 ou Martyrs. En dépit du caractère presque familial de l’entreprise, Christophe Gans ne connaît pas une aventure de tout repos, en atteste l’important dépassement de budget (des 120 millions de francs initialement prévus, il arrive à 200 millions, soit 30 millions d’euros) et un temps de tournage qui va progressivement doubler. Cependant, rarement dans l’histoire francophone récente, un réalisateur n’aura pu à ce point disposer des moyens de ses ambitions. En l’occurrence, réanimer un cinéma populaire français moribond ou signer un prototype « néo-populaire » pour citer Jean-Baptiste Thoret au cours son entretien fleuve (près d’une heure et demie) avec Christophe Gans disponible dans un passionnant nouveau supplément. À l’issue d’une année 2001 riche en succès massifs, des premiers opus d’Harry Potter et du Seigneur des anneaux, en passant par les grosses machines comiques que furent La Vérité si je mens ! 2, Le Placard ou Tanguy, deux films revêtent le costume de véritables phénomènes, Le Fabuleux destin d’Amélie Poulain et Le Pacte des loups. Ironie du sort, les longs-métrages de Jeunet et Gans furent également les pionniers tricolores du montage en numérique. Pour autant, ont-ils amorcé un bouleversement dans l’industrie ? Ont-ils contribué à changer la face du cinéma français à l’aube d’un nouveau millénaire ?
La volonté de Christophe Gans est clairement revendiquée dès le départ du projet, il désire retrouver le souffle du grand spectacle hexagonal, à l’image de la série des Angélique qui a bercé son enfance. Pour parvenir à ses fins, il s’empare donc d’une légende occitane et l’inscrit dans un cadre purement local. Les paysages du Gers, de la Dordogne et des Hautes-Pyrénées, où s’est déroulé le tournage, se parent de ruines de commanderies de templiers, échos à une histoire nationale clairement définie. S’il flirte à de nombreuses reprises avec le surnaturel, il lève néanmoins le voile sur une époque obscurantiste, gangrénée par un retour à un fondamentalisme religieux en réaction aux Lumières et aux divers mouvements populaires qui mèneront à la Révolution quelques années plus tard. Le Mal est dans tous les esprits, il est le coupable des massacres mais aussi le responsable désigné d’une simple crise d’épilepsie. Tous semblent espérer secrètement que le Diable, représenté sur les peintures et les bas-reliefs qui ornent les murs du château des Morangias comme de l’église du village, se manifeste afin d’avoir raison. Dans l’entretien présent en bonus, Gans confesse lui-même que la montée du Front National au cours de la fin des années 90, aboutissant à la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle de 2002, a grandement nourri le récit. Le portrait de la noblesse, déconnectée des réalités du peuple, microcosme clos et guindé, permet au cinéaste des détours comiques où les marquis de province sont moqués, lointain écho à la tradition française chère à Molière. Des respirations humoristiques ou absurdes salutaires, tels ces chasseurs mercenaires, engagés par les troupes du roi, qui affrontent les deux héros déguisés en bergère afin d’attirer la bête. Face à cette élite, le protagoniste, libertin, savant et en avance sur son temps, incarne à la fois l’esprit de révolte et de bouleversement de la société, ainsi qu’une part du défunt Esprit Canal qui régnait encore alors au sein de la chaîne cryptée. L’aventure de Grégoire débute par ailleurs après la fin de l’histoire officielle, comme si le réalisateur souhaitait à la fois nous plonger dans les arcanes de ce XVIIIème siècle fantasmé, tout en gardant un ancrage dans ses réalités.
Si certains ont cru déceler un propos idéologique réactionnaire, fustigeant la vision de Gans de la Terreur, il faut plutôt percevoir dans la montée à l’échafaud de Thomas d’Apcher vieillissant, incarné par Jacques Perrin, la fin d’un âge d’or du cinéma français. Celui qui revendique une certaine méfiance envers la nostalgie et se définit lui-même comme mélancolique, rend ainsi un hommage émouvant aux grandes figures qui ont façonné sa culture. Le Pacte des loups organise la rencontre entre une génération d’acteurs émergents et des légendes made in France. Samuel Le Bihan, alors en pleine ascension après les succès de Vénus Beauté (Institut) et Jet Set, côtoie ainsi les jeunes talents issus de la galaxie Dardenne, Jérémie Renier et Emilie Dequenne (tout juste primée pour sa prestation dans le palmé Rosetta), ou Vincent Cassel, dans un rôle initialement proposé à Albert Dupontel. Face à eux, des vétérans aux filmographies monstrueuses : Perrin donc, Jean Yanne, Bernard Fresson, Jean-François Stévenin, Bernard Farcy ou encore Edith Scob. Des noms qui ont, chacun à leur manière, nourri l’idée d’un certain cinéma hexagonal, libre, anticonformiste, qui n’hésitait pas à flirter avec le fantastique (inoubliable Scob dans Les Yeux sans visage), ici confronté aux nouvelles têtes d’affiche. A posteriori, la rencontre ne porte pas toujours ses fruits, certains noms n’ont pas eu la carrière escomptée (Le Bihan un peu trop frimeur dans son rôle de Grégoire de Fronsac) quand d’autres, pourtant talentueux, ne livrent pas leur meilleure performance, à l’image de Cassel cabotinant un Jean-François de Morangias immédiatement antipathique. Peu importe, l’idée est louable et, au milieu des « gueules » habituelles du genre (François Hadji-Lazaro, Philippe Nahon), les deux mondes s’entrechoquent, se toisent et finalement se mêlent dans un tout cohérent, fidèle au projet global du metteur en scène.
Cet adieu à un cinéma disparu, Christophe Gans l’adresse à tous les genres qu’il affectionne. Le réalisateur fait le pari de fusionner les courants sans jamais choisir la facilité du second degré et du clin d’œil complice à son spectateur. Le Pacte des loups est un long-métrage foncièrement sincère et naïf, qui mise sur notre foi en sa matière filmique pour pouvoir y percevoir toutes ses qualités. La sensation de trop-plein qui peut parfois s’en dégager est la conséquence directe de la passion de son auteur. Ici tout déborde, à l’instar des arrière-plans toujours vivants, dans un melting-pot parfois too much, souvent jouissif. Sueurs Froides (la première apparition d’Emilie Dequenne) rencontre Federico Fellini (les scènes dans le bordel) et Les Dents de la mer (l’introduction brutale) fraternise avec les grands thèmes du giallo (inceste, secrets de famille). Une intrigue feuilletonesque, hommage à Louis Feuillade ou à L’Évadé du bagne de Riccardo Freda, comme le fait remarquer Jean-Baptiste Thoret, que Stéphane Cabel revendique comme héritier des écrits de James Ellroy, que Gans transforme en un pot-pourri de ses maîtres. De Chang Cheh et sa Rage du tigre, avec lequel il partage le monteur David Wu (également collaborateur de John Woo), à Sergio Leone, en passant par Mario Bava ou Terence Fisher (superbe séquence de cauchemar). Son amour du cinéma asiatique le pousse à choisir le légendaire Philip Kwok (À toute épreuve et de nombreux films de la Shaw Brothers) afin de chorégraphier les nombreux et impressionnants combats. Au western, il emprunte une iconisation de ses héros ainsi que leur définition par les armes qu’ils emploient (également une convention du wu xia pian). La bande-originale de Joseph Lo Duca (compositeur fidèle de Sam Raimi, à l’œuvre sur la trilogie Evil Dead) renvoie quant à elle par instants à Ennio Morricone. Le film de cowboys côtoie le mythe du loup-garou dans un récit elliptique qui use de fondus enchaînés, de surimpressions ainsi que de ses décors et sa lumière pour signifier le temps qui passe, les saisons qui changent. La sensation précède le sens, l’action précède la réflexion, le long-métrage se veut organique, viscéral, sensuel même. La superbe photo de Dan Laustsen, qui vient alors de commencer sa collaboration avec Guillermo Del Toro avec Mimic, avant de le retrouver par la suite à de nombreuses reprises, y est pour beaucoup dans le succès de l’ensemble. Le chef-opérateur entoure les personnages d’une lumière mordorée ou bleutée, les encadre dans des miroirs et ose même quelques transitions audacieuses, à l’image de celle qui voit le corps nu de Monica Bellucci se changer en paysage enneigé.
Mais les références de Christophe Gans ne se limitent pas à ses cinéastes favoris ou aux genres qu’il vénère. Le metteur en scène démontre également un amour pour les monstres en s’adjoignant les talents du Jim Henson’s Creature Shop derrière les animatroniques de La Petite boutique des horreurs ou encore Les Tortues Ninja. En résulte une bête au design surprenant bien que quelque peu gâchée par un recours approximatif aux images de synthèse, seul élément véritablement daté. Sa première apparition se fait d’ailleurs à travers le regard d’une enfant, probable miroir des souvenirs de jeunesse de Gans lorsqu’il découvrait les monstres qui l’ont terrifié à l’écran. Grand gamer (il n’a pas été choisi pour porter à l’écran Silent Hill par hasard), il profite de l’occasion pour adresser des clins d’œil au monde du jeu vidéo. À travers l’arme utilisée par Jean-François, copie de celle employée par Ivy dans SoulCalibur, ou encore son emploi d’un scrolling hérité de Tekken pour le combat final. Les carnets de Grégoire, illustrés par Mathieu Lauffray (dessinateur des tomes de Prophet et Long John Silver et collaborateur de Pascal Laugier sur Saint Ange), dévoilent une autre facette du metteur en scène, celle d’un amoureux de la bande dessinée et du comic book dont il tentera en vain d’adapter certains des héros les plus célèbres : Corto Maltese et Rahan. De Fronsac, hédoniste et jouisseur, peut se lire comme un autoportrait en creux du réalisateur, passionné par le pur plaisir qu’il offre à son spectateur. Néanmoins, l’apport le plus conséquent de ce dernier demeure le personnage de Mani. Simple valet dans le script original, le metteur en scène choisit d’en faire un combattant / chaman, il renvoie au Dernier des Mohicans, l’un de ses films fétiches, et permet à son acteur Mark Dacascos, de livrer la meilleure prestation de sa carrière, inspiré de ses rencontres avec des spécialistes de la culture Mohawk. Il est amusant de constater que bien que solidement enraciné dans une histoire du cinéma français fièrement revendiquée, c’est un comédien étranger qui incarne son double de fiction, celui avec qui il partage le plus de points communs, de son expérience dans les arts martiaux à son rapport à la nature… Plus personnel que ses atours de blockbuster hexagonal ne laissent présager, Le Pacte des loups ne pouvait que lancer une nouvelle vague à même de réinvestir les mythes nationaux pour en livrer une version purement cinématographique. Et pourtant…
Plus de vingt ans après sa sortie en salles, que reste-t-il du film ? La question de sa postérité est abordée avec franchise par le cinéaste et Jean-Baptiste Thoret dans les suppléments. Une petite aura culte sous nos contrées, un véritable respect à l’international, il est notamment paru en Blu-Ray chez les Américains de Shout ! Factory, entre autres. Nul n’est prophète en son pays et Christophe Gans semble avoir davantage marqué les esprits à l’étranger, se retrouvant même ouvertement cité dans le jeu vidéo Bloodborne de Hidetaka Miyazaki, dont le look du héros reprend celui de Grégoire et Mani. La boucle s’est d’elle-même bouclée à l’autre bout du monde. Un constat surprenant tant le long-métrage, certes sous influences diverses, met néanmoins un point d’honneur à s’ancrer dans une réalité et un imaginaire typiquement français, de son décorum jusqu’à sa vision d’une noblesse moribonde. Le producteur Richard Grandpierre lui-même considère que le succès du Pacte des loups tient du miracle et François Cognard confesse qu’il s’agissait de l’une des affaires les plus rentables de Canal +. Queue de comète d’une certaine époque aventureuse de la chaîne, sa sortie sera symboliquement suivie (sans aucune corrélation) de l’éviction d’Alain de Greef et Pierre Lescure lors du rachat par le groupe Vivendi Universal. Au-delà de sa maestria à agglomérer des références aussi diverses que contradictoires, le metteur en scène parvient, en outre, à donner corps à un scénario d’une efficacité redoutable, qualité que ses nombreux successeurs ont rarement retrouvée. Objet clivant, parfois caricaturé, résumé à un vulgaire amas de clins d’œil plus ou moins bien réinterprétés, une bisserie vaguement divertissante mais oubliable, le film a pourtant refait sensation au cours de l’année 2022. À Cannes d’abord où il fut projeté en mai dans sa copie restaurée (après que l’événement ait été repoussé l’année précédente pour cause de COVID), puis dans les salles, à l’occasion de sa ressortie le 10 juin dernier.
Il inonde maintenant le marché vidéo au cours de ce dernier trimestre. Une somptueuse édition limitée collector 20ème anniversaire (déjà épuisée) a lancé les hostilités, elle contient le film en version longue remasterisée, en Blu-Ray et Blu-Ray 4K, ainsi que les nombreux bonus d’époque (dont les formidables Making-of réalisés par Pascal Laugier) répartis sur 3 DVD et en prime un livre comprenant les 200 pages de storyboards. Les Blu-Ray et Blu-Ray 4K s’apprêtent désormais à être vendus séparément. Cette mise à jour constitue l’occasion parfaite de se repencher sur une œuvre colossale dont son auteur cherchera en vain à retrouver la formule et la grâce des années plus tard avec son très décevant La Belle et la bête. Le Pacte des loups demeure cependant un cas à part, un prototype passionnant qui ne fera malheureusement pas de petits, ne précédera pas véritablement de courants. Il est le vestige d’une ère où le cinéma français a voulu se faire aussi gros que les mastodontes américains. Nous pourrions évoquer les nombreux projets annoncés qui n’auront finalement pas pu voir le jour, mais aussi des tentatives opportunistes de capitaliser cyniquement sur son succès, transformer ses qualités en recette à appliquer, à l’instar du désincarné et calamiteux Arsène Lupin de Jean-Paul Salomé en 2004. Si le long-métrage de Christophe Gans n’a pas bouleversé en profondeur la production hexagonale, c’est aussi parce qu’au lieu de faire appel à des cinéastes passionnés et ambitieux, ses potentiels héritiers furent pour la majorité confiés à des artisans que nous n’hésiteront pas à qualifier de tacherons, ou jeunes talents prometteurs qui n’auront pas su transformer l’essai. Gans y est parvenu (non sans défauts et maladresses), le temps d’un film que l’on redécouvre aujourd’hui avec une certaine tendresse, un plaisir intact et un profond respect pour la tenue globale de son ambition.
(1) Extrait de l’article « Le Pactole des loups » de Vincent Gauthier, publié dans le numéro 85 de SoFilm.
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