Sorti en 1983, Horror Star (également connu sous les titres Frightmare ou The Horror Star) est désormais disponible en Blu-Ray pour la première fois en France.
À l’annonce du décès du célèbre acteur de films d’épouvante Conrad Ragzoff, un groupe d’étudiants en cinéma vole son cadavre, pensant lui rendre hommage. Mais l’acteur – qui se trouvait déjà de son vivant être un ignoble sadique amateur de magie noire – ressuscite et entreprend de décimer ses profanateurs.
Écrit et réalisé par Norman Thaddeus Vane et mettant en vedette Ferdy Mayne – révélé par Le Bal des Vampires et vu ensuite chez Stanley Kubrick, Richard Fleischer ou encore Blake Edwards – Horror Star ne se démarque pas tant par son intrigue, volontairement caricaturale – avec son groupe de jeunes gens qu’une entité maléfique décide de tuer un par un – que par ses thématiques méta incarnées via un ensemble de choix audacieux, témoins de la cinéphilie de son auteur et esquissant une réflexion des plus intéressantes sur le septième art.
Norman Thaddeus Vane ouvre ainsi son film par une mise en abyme, en l’occurrence le tournage d’une publicité dans laquelle le personnage de Conrad Ragzoff, vieillissant et au creux de la vague, joue le rôle d’un vampire. Si cette introduction peut aisément faire croire à une parodie – ou tout au moins à une comédie dramatique – le spectateur est aussitôt détrompé, la suite de la scène montrant ce même Ragzoff tuer de sang-froid son metteur en scène après que celui-ci a remis en question ses qualités d’acteur.
Ce ton macabre se confirme avec la séquence suivante où Ragzoff se montre une fois encore froid, calculateur, mégalomane et surtout prêt à occire quiconque ose le désacraliser, le tout en donnant l’impression de se croire en permanence sur scène, si bien que le spectateur peut légitimement s’interroger, dans un premier temps, quant à la nature des événements dont il est le témoin.
Cette narration singulière – fondée sur le fil séparant la réalité de la fiction et le réel du surnaturel – largement renforcée par l’amour de Ragzoff pour l’auto-mise en scène permanente (qui le conduit notamment à enregistrer, avant sa mort, des centaines de messages vidéo visant à saluer les visiteurs et maudire les profanateurs de son caveau) structure ainsi tout le début du film, et ce jusqu’au moment où ses jeunes fans, aveuglés par leur idolâtrie, décident d’emporter son cercueil chez eux, persuadés de la légitimité de leur geste et sans se douter qu’il leur vaudra de basculer définitivement – et le public avec eux – dans le genre du « slasher ».
S’appropriant le plus littéralement du monde l’idée maintes fois théorisée que le cinéma serait un art morbide – car voué à conserver l’image des morts et les faire vivre éternellement – Horror Star lui donne ici une ampleur inédite, offrant la possibilité à un acteur d’utiliser sa propre image non seulement pour vivre éternellement mais aussi et surtout pour ressusciter comme bon lui semble (sur un écran comme en chair et en os) hanter son public et torturer tous ceux qui lui manquent de respect.
Satire acerbe du cinéma (présenté ici comme une forme de malédiction donnant aussi bien accès à l’immortalité qu’à l’Enfer) le film s’avère également prophétique, anticipant les actuels délires idolâtres de certains geeks trop souvent enclins à traiter leurs monstres sacrés comme des objets (et soulignant au passage le contraste entre l’image publique des stars et la réalité de leur existence).
Cette démarche – et le choix de l’éternelle égérie polanskienne qu’est Ferdy Mayne pour incarner Conrad Ragzoff – permettent également à Norman Thaddeus Vane d’inscrire directement son film dans un certain sous-genre du cinéma d’épouvante se caractérisant par l’emploi, entre hommage appuyé et roublardise, d’anciennes stars du genre restées prisonnières de leur image. On se souvient notamment de Boris Karloff, quasiment dans son propre rôle – en acteur vieillissant tourmenté par un jeune déséquilibré – pour son ultime apparition dans le terrifiant La Cible (1968) de Peter Bogdanovich… ou de Vincent Price dans ses nombreux rôles d’acteur pris entre la peur de l’oubli et celle de la mort, parmi lesquels les magnifiques Theatre of Blood (1973) de Douglas Hickox, Madhouse (1974) de Jim Clark ou encore le mésestimé House Of The Long Shadows (1983) de Peter Walker (dans lequel jouaient également Peter Cushing et Christopher Lee)…
Porté par Ferdy Mayne – qui compose pour l’occasion un incroyable personnage de cabotin monstrueux – Horror Star se révèle également impressionnant par la beauté de sa photographie – faite d’atmosphères enfumées et de compositions expressionnistes – et jubilatoire par l’inventivité de ses scènes de meurtres – de loin l’un de ses meilleurs atouts – ainsi que les références qui le constellent, à commencer évidemment par les films de vampires, de Nosferatu aux productions Hammer, le tout étant largement renforcé par ses magnifiques décors – cimetière labyrinthique, manoir angoissant – archétypaux en diable.
Dépassant le pastiche et le simple hommage aux classiques du cinéma d’horreur, Norman Thaddeus Vane offre une œuvre où la nostalgie s’entremêle à la réflexion sur le septième art et la célébrité, pour un résultat étrange, singulier et d’une indéfinissable poésie.
Disponible en Blu-Ray chez UNCUT MOVIES
BONUS :
– Livret de 32 pages
– Trailer original du film
– Galerie de photos
– Galerie de jaquettes
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