A la vision de The Wretched, soit on décide de grommeler qu’on a vu ça 1000 fois (gneu, gneu, gneu, les clichés…), soit on se félicite les Pierce Brothers (réalisateurs d’un pourtant très oubliable Dead Heads) livrent un vrai film d’épouvante dans une tradition qui s’est perdue, celle des années 80 que ce soit dans sa narration, son sens de la péripétie ou sa construction – du prologue à l’épilogue – avec ses ados sympas qui découvrent un secret qu’il ne faudrait pas et ses charmantes incohérences. Et Sa cruauté également ! Car si le mal fait aux enfants au cinéma vous dérange, passez votre chemin : la sorcière de The Wretched se plait à les croquer sans ménager vos âmes sensibles. Le prologue n’était pourtant pas très engageant, promettant un amas de clichés comme ils sont légion dans les direct-to-dvd. Précédée d’un “il y a 35 ans”, une scène horrifique vite emballée introduit une future victime dans une maison déserte : découverte horrible dans une cave, puis la porte se referme sur ses cris d’agonie.
Cette ouverture constitue en réalité une jolie feinte de la part des réalisateurs pour lancer le suspense, et pour nous avouer avec humour que si tout commence en 1984, la suite ne s’inscrira pas dans la tendance actuelle du retour des walkmans et des courses à vélo : ce sera une histoire de notre époque, avec des héros possédant des smartphones, et capable de faire à toute vitesse des recherches sur google images. A l’ancienne certes, mais sans une once de tentation nostalgique ! Dès lors, les Pierce Brothers déroulent leur intrigue en toute modestie, naviguant avec délice au milieu des poncifs du genre, non pour leur rendre hommage mais s’inscrire dans une pure tradition de l’horreur, un mode de narration archaïque où le spectateur, moins aux aguets de l’invraisemblance, en suspension consentie de l’incrédulité, se contente avec délectation de jouer le jeu, de trembler avec le héros, de craindre pour son sort, et d’espérer qu’il fera le bon choix de petite copine.
Attend-on une ultime surprise finale lorsque les personnages s’imaginent que « tout est fini » ? Elle sera là. A ce stade, le déjà-vu devient une déclaration d’amour. Parfaitement mené, avec sa très belle mise en scène, The Wretched n’en met pas plein la vue en permanence et apprécie aussi les zones d’ombre. Il se plait à multiplier les ellipses, à ménager la frustration en interrompant net les scènes en plein climax, alors qu’on espérait en voir plus. C’est une œuvre ludique, un peu farceuse avec son spectateur, mais qui ne sombre jamais dans la distance geek, s’attachant à raconter son histoire à la fois avec légèreté et respect. Un beau conte païen qui évoque les arbres dans lesquels sommeillent bien des maléfices renvoyant souvent à la trivialité du mésestimé The Guardian (La nurse) de William Friedkin et rappelant également parfois l’excellent The Hallow (Le Sanctuaire) de Corin Hardy. A l’heure où tout se doit d’être spectaculaire et montré, où les résolutions pour se débarrasser du monstre se révèlent régulièrement interminables, The Wretched ne montre que très rarement sa créature, et fuit l’apothéose qui n’en finit pas. Il provoque le plaisir majeur du film mineur, c’est à dire qui ose la peur premier degré, spontanément, sincèrement. Le genre de film qui faisait la beauté du festival d’Avoriaz, sans sous texte, sans symbolique lourde… Cette capacité de divertir simplement s’est un peu perdue. Une joie simple et essentielle : celle de retrouver nos monstres cachés sous le lit, dans nos livres, nos fantasmes enfantins. Vous voulez gardez un sourire de gamin pendant tout un film et juste regretter, une fois le générique terminé, de ne plus avoir 14 ans ? Ce gros feel-good de l’épouvante est fait pour vous.
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Pas de supplément en vue mais une superbe copie avec une bande son (particulièrement en vo) qui vous permettra de frissonner de plaisir dans des conditions optimales.
DVD et et Blu-ray édités par les éditions Koba. Il est commandable directement sur le site Koba
Sortie le 2 décembre 2020
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