Nous attendions beaucoup du deuxième long-métrage d’Alberto Vázquez après son magnifique Psiconautas. Nous le suivons depuis un moment autant à travers ses courts métrages splendides et que ses livres, un auteur ayant réussi en quelques oeuvres à imposer un univers bien à lui, entre l’enfance et la cruauté universelle. La graine d’Unicorn Wars, avait été plantée par son magnifique court Sangre de Unicornio. qui non seulement en constituait la genèse mais parvenait en quelques minutes à installer cette confrontation perturbante et enthousiasmante entre l’imaginaire féérique et le mal intrinsèque à l’homme. Nous parler de la noirceur de l’humanité, à travers les créatures imaginaires, les forêts magiques et les nounours, c’était alléchant, et c’est finalement ce qu’avait fait si bien Lord Dunsany en 1924 avec La fille du roi des elfes. avec son prince chasseur obsédé à l’idée de tuer des licornes. Ce passionnant cinéma-oxymore allait donc donner naissance à nouvel avatar, annoncé comme un croisement entre Apocalypse Now et Bambi. Las, la déception fut à la hauteur des espérances.
Unicorn Wars se déroule dans un univers où les licornes sont des êtres maléfiques, que la race des oursons combat. Dans un centre d’entraînement militaire dirigé par le sergent Groscâlin, Célestin et ses compagnons de chambrée se préparent pour leur grande opération offensive. Les horreurs de la guerre attendent nos oursons, alors transformés en chair à canon. Si l’idée du contrepied paraît d’abord séduisante, elle devient dans la réalité du film particulièrement lourde, avec tous ces cœurs, ces « cœur sur vous, mon commandant », cette signalétique rose bonbon omniprésente, ces jeux de mots qui en font des tonnes et transforment quelque chose d’un peu décalé en gros gag répétitif. La parabole anti-militariste et anti-viriliste est à peu près aussi fine que les pastiches et citations de film de guerre comme Full Metal Jacket et Platoon.
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Après une mise en place laborieuse, lorsque les oursons partent enfin dans la forêt que le massacre rouge et arc-en-ciel commence (amputations, déchiquetages et autres joyeusetés), le résultat se révèle plus bourratif que délirant. On cherche en vain la poésie que l’on aimait tant chez Vázquez et qui affleure à peine au détour de quelques scènes, on se raccroche aux superbes compositions et couleurs des paysages, on goûte parfois la cruauté sous-jacente du conte, et l’on est cueilli négativement par la naïveté de l’image finale, que l’on voyait venir et bien trop proche du Miyazaki de Princesse Mononoke.
Programmatique et répétitif, soucieux de plaire à un public plus large, de provoquer ses rires outragés et ses applaudissements, Unicorn Wars s’égare ici dans la provoc et la surenchère. Lorgnant plus du côté de la série Happy Tree Friends – qui au moins jouait franc-jeu la carte du trash – que de Psiconautas, Alberto Vázquez se renie et perd sa griffe, donnant alors la désagréable sensation d’imiter plutôt que de créer. Comme par enchantement, la singularité et la sincérité qui faisaient la beauté de son cinéma se sont volatilisées. Vraiment dommage !
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