Premier long-métrage de l’actrice Audrey Dana, Sous les jupes des filles crée la surprise. Envisagé comme un éventuel produit marketing, son audace et son tonus emportent comme une bourrasque nos attentes circonspectes. Audrey Dana fait souffler un vent nouveau dans le paysage sinistré de la comédie française, réussissant un film qui pourrait prétendre au futur statut de comédie française culte comme le fut Le Père Noël est une ordure en son temps, l’offensive féminine, voire féministe, en plus.
Avouons-le : au départ, nous y allions pour des raisons de midinette : les beaux yeux d’Adjani et de Paradis, avec des préjugés de cinéphile pointilleux, alimentés par un titre trivial qui ne fait pas envie ou alors de façon de façon trop évidente, une affiche « all stars » (pas moins de onze vedettes féminines) ce qui ne l’empêche pas d’être cheap dans son design et un pitch qui a l’air d’être sponsorisé par Always ou Tampax : « Les 28 premiers jours de printemps, les cycles menstruels, onze femmes… »
Soutenue par la justesse des personnages, et de leurs dialogues une série de scènes hilarantes nous permet de rire parfois gras, mais toujours intelligemment.
Certes, la musique est mainstream à souhait, pop FM ; la scène finale dont l’intention réjouit, n’est pas d’une grâce inouïe, quelques vannes frisent la vulgarité, mais ce sont d’infimes détails au regard du plaisir que le film procure quasiment de bout en bout. Du casting à priori très « bankable », il n’y a rien à redire, offrant au passage quelques jubilatoires contre-emploi à des stars, comme Vanessa Paradis, excellente, dans le rôle de Rose, une executive « control freak » qui tyrannise suavement sa stagiaire à coups de caprices (les bougies Baobab à la cannelle retrouver ses « amies », elle qui est haïe depuis la maternelle…).
Plus encore que des « femmes libérées », Dana invente un genre de « film libéré », affranchi d’un tas de code narratifs et cinématographiques. A force de tordre le cou aux conventions, on espère que Sous les jupes va ouvrir des portes à un cinéma plus libre, plus fou, plus féminin. Suite à la projection des "Infidèles " Dana a relevé que la comédie française se place la plupart du temps du côté des hommes, les femme y étant réduites à des rôles de faire-valoir. C’est suite à ce constat qu’elle a voulu réaliser "une comédie de femmes", pour les femmes. Mais, sa comédie va au-delà car, comme dirait l’icône Genesis P-Orridge, leader de Throbbing Gristle et Psychic TV, devenu mi-femme, mi-homme (pandrogyne dixit l’intéressé(e) ) : « Il n’y pas de genres ». En ce sens, Sous les Jupes des filles en est l’application cinématographique, concrète, audacieuse, populaire sans jamais être populiste, un peu triviale et beaucoup réjouissante.
S L J D F est un film à la fois girly, pétillant, couillu, plein d‘une énergie transcendant les genres –cinématographiques, masculin-féminin. Une comédie qui, on le souhaite, fera date. Une mini insurrection en soi contre les diktats de la bien-pensance et de ce que doit être –ou pas- un film d’auteur. Un putsch bousculant et redistribuant de façon cathartique et drolatique les rôles et les genres.
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