Lauréat d’un Teddy Award à la Berlinale et d’un prix du jury ex-aequo au festival Chéries-Chéris en 2023, le long-métrage nigérian Toutes les couleurs du monde (All The Colours Of The World Are Between Black And White) de Babatunde Apalowo peut désormais être découvert dans les salles françaises. 

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Célibataire endurci, Bambino vit à Lagos, gagnant sa vie grâce à un emploi de chauffeur-livreur et entretenant des rapports cordiaux et solidaires avec son voisinage. Un jour, Bambino rencontre Bawa, un photographe qui éveille en lui des sentiments nouveaux…

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Se déroulant dans le Nigeria contemporain – où l’homosexualité est toujours passible d’emprisonnement, ce qui donne tout son sens au scénario, focalisé sur la naissance de la relation entre Bawa et Bambino et les remises en questions qu’elle implique pour ce dernier – Toutes les couleurs du monde saisit dès ses premières images par la qualité de sa mise en scène, celle-ci insufflant par son minimalisme assumé une force singulière au récit. 

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Babatunde Apalowo mise en effet sur une photographie sobre mais ne laissant rien au hasard afin de représenter tout en pudeur cette histoire portant sur l’intime. Soignant le moindre détail visible à l’écran, le réalisateur met en place pour chaque plan une structure précise au sein de laquelle il s’autorise divers jeux visuels (à base d’obstructions ou de surcadrages) venant renforcer la narration. L’exemple le plus marquant se trouve au début du film, au cours duquel Bambino est le seul personnage réellement visible à la caméra (tous les autres apparaissent de dos, en amorce, en hors-champ ou derrière un élément de décor). Cet effet, voué à souligner sa solitude, disparaît lorsqu’il rencontre Bawa, dont le visage lui est révélé en même temps qu’au spectateur… et dont l’activité de photographe vient influer sur sa vie autant que sur l’intrigue (et la direction visuelle) du film. 

Commence alors, pour les deux hommes comme pour le public, un voyage au coeur de l’intime et où la question du regard – celui de Bambino sur lui-même et sur le monde, celui de Bawa, matérialisé par son appareil photo… et bien sûr le regard des autres – s’avère centrale. Ce voyage comporte inévitablement un arrière-plan déplaisant – celui du dehors, où les violences homophobes font partie du quotidien – obligeant les protagonistes à se cacher (et à se mentir), jusqu’au moment où l’aliénation, devenue trop grande, les force à choisir entre capitulation et conquête de leur liberté…

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Politique, poétique et profondément cinématographique, Toutes les couleurs du monde oppose au regard inquisiteur d’une société celui d’un photographe – double évident du metteur en scène – sondant le réel sans jugement, afin d’offrir au monde une véritable ode à l’amour de soi… et des autres.

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