Printemps 2020, les gestes barrières s’immiscent brutalement dans nos vies…
Dans un Paris aux allures de science-fiction, où la loi impose de rester chez soi, deux amis, Magali et Eric-John, s’aventurent à travers les rues désertes pour essayer de réinventer le lien aux autres. Dans la ville endormie, les fantômes sortent aussi, du fond des rues et des conversations téléphoniques entre Eric-John et son père, hanté par ses souvenirs de la Seconde Guerre mondiale…
Appréhendons en premier lieu cette « comédie documentaire » (comme elle se présente) comme une chronique de confinement, un témoignage de cette improbable parenthèse anxiogène qui fît soudainement ressembler notre quotidien à un film de fiction, du drame psychologique à la dystopie, du film d’anticipation au thriller social.
« Restez chez vous »
Ce film réalisé par un binôme constitué d’Eric-John Bretmel et de Magali Roucaut nous replonge dans cette étonnante et angoissante période avec des captations du réel d’alors, par Eric-John lui-même avec son téléphone lorsqu’il est chez lui ou bien par Magali Roucaut lorsqu’elle filme au dehors les déambulations de son ami et ses échanges, quelquefois tendus, d’autres fois plus lunaires, au gré des rencontres fortuites ou provoquées.
Ce sont donc des morceaux de vie domestiques, notamment d’interminables séances de lavages de mains, de doigts ou encore d’objets. Ce sont encore quelques échanges également avec un voisin de palier derrière sa porte, un riverain qui proteste à sa fenêtre ou bien encore un employé des pompes funèbres proprement sonné par le flux des prises en charge. Ce sont également ces plans toujours saisissants de rues parisiennes complètement désertes aux heures théoriquement ouvrables. Ce sont enfin différents échanges par fenêtre ou téléphone interposé avec les proches d’Eric-John Bretnel, protagoniste central du film.
« Bonne fin de route »
Pas de grand angle société donc mais un récit intime qui réunit avec finesse et pudeur personnes confinées d’alors et enfants traqués contraints de se cacher lors de l’Occupation. Cette mise en perspective fait mouche au fur et à mesure que les souvenirs familiaux liés à la seconde guerre mondiale affluent dans la seconde partie du film à la faveur des échanges téléphoniques entre Eric-John Bretmel et son père. La figure d’une tante récemment décédée émerge alors et se dévoile subrepticement comme la pièce centrale du récit comme de la famille, une héroïne des temps passés pourrait-on dire.
« C’est fantomatique, tout le monde le dit »
Au final cette chronique qui oscille entre des petites bulles de confinement prises sur le vif et des fragrances d’histoire familiale sait nous émouvoir et nous rappeler que, tant dans le silence de ces rues désertes que dans le tumulte de nos émotions et de nos pensées intimes qui les traversent, la notion de réel reste au final hautement subjective, une sorte de synthèse de nos sens, de notre histoire et de nos projections.
« Ceci n’est pas une guerre », un film de Magali Roucaut et Eric-John Bretmel
Durée : 1h14
La Luna Productions
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