Premier long-métrage -en anglais-, d’un jeune réalisateur français Antoine Bardou-Jacquet, Moonwalkers est une réjouissante découverte : une fiction ludique qui –comme l’énonce son pitch- tourne voluptueusement et malicieusement autour de la vraie fausse histoire de comment on n’a pas marché sur la lune.

Moonwalker 1

Moonwalkers allie brio de la mise en scène et efficacité du scénario à l’anglo-saxonne à une singularité et véritable touche personnelle, un équilibre pas toujours évident à maintenir pour un Frenchie expatrié. Antoine Bardou Jacquet, auréolé de prix pour ses nombreuses publicités (Honda, Shell…) a tourné avec Partizan ( grosse société de clips et de publicité) en Angleterre sous la houlette du scénariste british Dean Craig (entre autres la comédie noire, bien écrite, mais programmatique : Joyeuses funérailles) avec des acteurs anglo-saxons. En résulte une variation jouissive sur une des théories du complot qui trône au hit-parade des conspirationnistes : celle de la mission Apollo.
En 1969, en plein swinging London, l’agent de la CIA Kidman a pour ordre de contacter Stanley Kubrick et le convaincre de mettre en scène un faux alunissage de Apollo 11 en cas d’échec de la mission. Involontairement, sa route va croiser celle d’un producteur musical poissard, Johnny.
Ajoutons que Kidman a les traits de Ron Perlman, ex-Hellboy , pince sans rire à potentiel comique illimité et Johnny, l’empoté, ceux d’un ex-Harry Potter : Rupert Grint.
Le duo improbable va nous faire vivre un pur trip au sens premier, l’action ne se situe pas dans l’âge d’or psychédélique impunément. C’est aussi et avant tout, un truculent choc générationnel et culturel entre un américain conservateur et brutal, revenu du Vietnam, et un anglais loser, manager d’un groupe de rock dont seul l’égo du chanteur est à la hauteur. Bardou Jaquet et son scénariste ont pris un plaisir contagieux à explorer toutes les situations antagonistes qui en résultent.
Bardou Jacquet s’amuse à rassembler gangsters tout droits sortis de Performance du duo Cammel/Roeg, beautés topless et esprit arty Warholien, avec des clins d’œil délicieusement irrévérencieux au plus anglais de tous les cinéastes américains, Sir Kubrick : scène d’ultraviolence sur fond de Beethoven, climax en apesanteur hilarant.
Le décor principal, la maison du cinéaste versatile, Diva (sic), est ouvertement inspiré par la Factory d’Andy Warhol et la demeure de l’artiste bohème interprété par Mick Jagger, dans Performance.

moonwalkers Milieu

Un seul bémol : les images d’archives finales de l’alunissage sont un peu trop consensuelles en regard d’un film aussi libre et insolent. Une ambiguïté plus grande aurait créé une mise en abyme bienvenue. On peut se demander si c’est un choix personnel ou une pression des studios, soucieux de calmer la thèse complotiste et de ne pas raviver la mèche de la manipulation des images. Moonwalkers est tellement libre et audacieux dans sa façon de revisiter les thèses complotistes que cet atterrissage sage déçoit un peu. D’autant que l’insolence du projet initial est palpable dans les propos de Bardou Jaquet. Il raconte qu’il a eu l’idée du film en cherchant sur Internet des images des missions Apollo pour montrer les premiers hommes sur la Lune à son fils de six ans. La moitié des sites expliquait avec minutie et nombreuses preuves pseudo-scientifiques que les Américains n’avaient jamais posé un orteil là-haut. Bardou jaquet a ensuite découvert le faux documentaire de Karel, The dark side of the moon, qui traite avec beaucoup de sérieux le sujet de la simulation d’alunissage qu’aurait filmé Kubrick. Il s’est alors pris à imaginer comment la CIA – qui n’en était pas à son premier coup tordu – aurait pu mettre sur pied un tel dispositif. De là découle Moonwalkers, une comédie sérieusement drôle.

Moonwalkers 2

Pour le cinéaste, il s’agit avant tout d’une satire, forme très sophistiquée de la comédie. On sent qu’il a pris sa mission à cœur. Le rire est viral et le plaisir de replonger avec un fétichisme teinté d’irrévérence en 1969, année psychédélique, ô combien, un régal dont on aurait tort de se priver.
Les aficionados du pointu l’Etrange Festival ne s’y sont pas trompés, en attribuant au film le prix du public.

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