Premier film de l’australienne Rosemary Myers, Fantastic Birthday est une adaptation de la pièce à succès qu’elle avait elle-même montée au Windmill Theatre. Matthew Whittet, l’auteur de la pièce, l’a adaptée pour l’écran. Si le film convoque certes Wes Anderson, Napoleon Dynamite, voire un des meilleurs Todd Solodnz : Bienvenue dans l’Age Ingrat, son charme fou, lui, est unique. Fantastic Birthday narre de façon tonique, cruelle et tendre à la fois l’échappée onirique exubérante d’une adolescente introvertie. Soit, Greta Driscoll, nouvelle venue dans un lycée où règnent trois pétasses hostiles dites les triplettes et où son seul ami est un gay qui s’ignore : Elliot. A son insu, sa mère va organiser une grosse fête d’anniversaire pour ses 15 ans. Mrs Driscoll est autant extravertie, sensuelle et en phase avec son époque : les années 70 que Greta est mal dans sa peau et « old school ». Elle ne veut pas grandir, encore moins être « populaire ». Passera-telle le cap de l’enfance ou restera-t-elle éternellement coincée ?- dans tous les sens du terme. Dit comme ca l’intrigue peut paraître terriblement puérile, mais c’est précisément le sujet de ce film : comment sortir de l’âge ingrat ? D’ailleurs il faudra en sortir littéralement en franchissant une forêt.
Le film ne boude pas son plaisir de se référer aux années libertaires qu’étaient les 70S : looks outrés, déferlantes de couleurs, clins d’œil à l’émission culte de disco : Soul Train : l’arrivée dansée des invités à la fête… Un plaisir contagieux : 77 minutes drôles et inventives. Les informations habituelles passent par des détournements ludiques : le titre du film sur un acteur peint comme un mur qui se confond avec le décor derrière lui ; « le jour d’après » indiqué sur la porte des toilettes ; « le jour de la fête » inscrit sur les ballons de la soirée… Le film ouvre sur un long et laborieux monologue d’Eliot tentant la conquête amicale de Greta qui se conclue par un plan enfin rapproché et la phrase que le film va s’amuser à malmener : 15 ans, c’est le tournant d’une nouvelle ère. Alternant tendre ironie à l’égard du personnage (la musique You make me feel I’m real qui introduit sa soirée alors que Greta est dans ses petits souliers…roses et rêve de s’évaporer, ce qui finira par arriver…) et moments d’empathie totale, Fantastic Birthday traduit avec humour et inventivité le malaise de l’adolescence et le sentiment de rejet que ca peut impliquer. Il passe ainsi non seulement par le truchement du conte et du clin d’œil aux années 70, mais aussi par des métaphores qui font mouche : Greta a un attachement excessif à la boite à musique que sa mère lui adonné pour ses 5 ans : ce sont toujours les mêmes chansons . Elle doit changer de musique, comme lui dira un avatar maternel -une mère littéralement givrée- quand Greta passe de l’autre côté. Raconter davantage cette odyssée tragi-comique serait inutile tant le plaisir distillé est communiqué par des astuces visuelles et une douce insolence qui passe par les images et non les mots. Des images d’Epinal de l’adolescence, sans cesse bousculées et revisitées. Un retour sur un âge vraiment ingrat et à grain qui convoque à la fois le rire et une émotion pour tous ceux qui connurent le sentiment de différence à l‘adolescence. Pas un grand film, mais un immense plaisir qui, de plus, se paye le luxe d’avoir une dimension cathartique. Déjà acclamé au Festival de Berlin, Fantastic Birthday , a obtenu plusieurs prix à divers festivals en Australie et aux USA. Le film peut diviser car l’alchimie est fragile et la frontière entre le détournement psychanalytique malicieux et la niaiserie, fine ; ce qui en fait sa force et sa limite.
[Sortie le 22 Mars]
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