Premier long-métrage de Simon Panay (déjà signataire, à 29 ans, de quatre courts dont le dernier, Ici personne ne meurt, lui a valu plus d’une centaine de récompenses dans divers festivals à travers le monde) et fruit de deux ans de travail, Si tu es un homme est un documentaire aussi captivant par son sujet que par sa forme.

Copyright JHR Films

Opio a 13 ans et travaille en surface dans la mine d’or de Perkoa, au Burkina Faso, afin de subvenir aux besoins de sa famille. Son père désirant qu’il aille à l’école mais également qu’il paye de sa poche ses frais de scolarité, le garçon décide, afin d’obtenir un meilleur salaire, d’aller travailler à l’intérieur des galeries souterraines de la mine, habituellement réservées aux adultes. 

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Exercice formel ambitieux, Si tu es un homme doit d’abord l’efficacité de sa narration au choix de Simon Panay (également caméraman de son long-métrage) de filmer chaque scène sans jamais intervenir directement ni que les protagonistes s’adressent à lui autrement qu’en voix off. La caméra recueille ainsi chaque scène, phrase ou information… sans le moindre jugement, jusqu’à se faire totalement oublier, à tel point qu’on se demande parfois si le film est un documentaire ou une fiction. 

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Ce parti-pris assumé permet une immersion totale du spectateur qui comprend dès les premières minutes le fonctionnement du monde où vit Opio et les nécessités l’obligeant, ainsi que des millions d’enfants à travers le monde, à travailler dur, dans des conditions catastrophiques et pour un salaire de misère afin de subvenir aux besoins de sa famille ne pouvant, ayant besoin dudit salaire, l’envoyer à l’école… 

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L’immersion est également visuelle, Simon Panay jouant régulièrement sur la profondeur de champ afin de suggérer le rapport des personnages à l’espace et captant, par son traitement de la lumière, la chaleur, l’intensité de l’effort physique des ouvriers travaillant sous un soleil de plomb, mais également, lorsque vient le moment pour Opio de descendre dans les grottes, la profondeur abyssale des galeries souterraines… L’atmosphère du film tourne alors brièvement à l’onirisme lorsque le passage d’un cap (entrer dans cet endroit dont Opio confiait avoir peur au début du film) devient, le temps d’une descente, aussi littéral que symbolique, marquant métaphoriquement le passage d’Opio à l’âge adulte. 

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Ce pouvoir immersif, témoin du talent et de la maîtrise technique de Simon Panay, n’est cependant pleinement employé que grâce à la force du récit pourtant simple qu’il permet de narrer : le parcours semé d’embûches d’un jeune garçon avançant, tenace et déterminé, vers un but précis qu’il n’a que peu de chances d’atteindre mais pour lequel il est prêt à travailler dur et sans relâche, quitte à essuyer un échec qu’il refuse jusqu’au bout d’envisager.

Leçon de ténacité et louange de l’effort, même lorsqu’il s’avère vain, Si tu es un homme rappelle, si besoin en était, que le documentaire est aussi cinématographique que la fiction et impose son auteur comme un cinéaste à suivre absolument. 

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