Issu du studio d’animation Mushi production à qui l’on doit les classiques Astro boy ou encore Belladonna et produit par la légendaire Nikkatsu, Yuki le secret de la montagne magique, réalisé au début des années 80, doit son intérêt principal à son scénario, d’une richesse plutôt dense pour une œuvre ouvertement destinée aux enfants. Considéré par certains comme étant l’ancêtre de Princesse Mononoke, ce manga animé nous plonge au cœur d’un Japon féodal, permettant de réactiver l’un des grands thèmes du cinéma japonais souvent brillamment illustrés par Akira Kurosawa : la lutte désespérée de pauvres paysans subissant les attaques de samouraïs et/ou de hors la loi. Avec bien sûr la dimension surnaturelle et animiste qui l’accompagne habilement intégrée à un cadre historique crédible. Yuki, vit au ciel avec ses grands parents qui veillent sur la terre. Le jour de ses 13 ans, elle est envoyée en mission sur terre pour ramener la paix dans le village saccagés et pillés par les brigands. Elle a un an pour rétablir l’ordre au risque d’être transformée en un ombre vent hurlant. Elle va aussi découvrir que les malheurs qui s’abattent sur les pauvres autochtones s’avèrent plus mystérieux que prévus. Adapté d’un conte de Ryusuke Saito, Yuki frappe par la richesse de son récit, les multiples rebondissements d’une histoire complexe qui mêle réflexion politique, envolée fantastique, conte philosophique et épopée guerrière dans la lignée de Sept samouraïs.
La jeune héroïne tout vêtue de blanc, tel un ange descendu du ciel, est un beau personnage, auquel nos chers têtes blondes ou brunes vont immédiatement s’identifier. Au risque même d’être parfois terrorisé à mi parcours au moment où le long métrage bifurque vers une ambiance plus sombre et tortueuse lorsque les paysans ne sont plus assimilés à de pauvres victimes innocentes.
Le regard humaniste d’un Hayao Miyazaki ou d’un Isao Takahata aurait certainement apporté davantage de noirceur. Cette fable puisant son inspiration dans la mythologie japonaise se révèle malgré tout décevante, la faute revenant en premier lieu à une animation statique et une déficience graphique concernant les arrières plans, platement dessinés, sans aucune profondeur de champ, esquissant des décors plutôt pauvres, ne dépareillant pas des séries animées japonaises qui déferlaient sur les écrans dans les années 80. Pour apprécier Yuki il ne faudra pas faire preuve de trop d’exigence esthétique, tant il s’en tient aux canons esthétiques télévisuels, sans grande originalité de mise en scène : aucun mouvement de caméra, utilisation maladroite du zoom, peu de variétés d’échelle de plans.
Le réalisateur Tadashi Imai est surtout connu pour ses drames sociaux d’après guerre et les Contes cruels du Bushido qui obtint l’Ours d’or en 1963. Yuki le secret de la montagne magique est son incursion dans le domaine de l’animation. Peut-être s’est il senti peu à l’aise avec le cinéma épique où la mise en scène est essentielle pour diffuser un minimum d’émotions et de souffle. C’est bien ce qui manque à ce très honnête manga Yuki, le secret de la montagne magique, une vraie curiosité cependant, bel aperçu de l’animation japonaise de l’époque qui permet de mesurer l’évolution parcourue depuis, qui reste captivant par les thèmes qu’il dégage et le message qu’il véhicule. Il sort pour la première fois sur nos écrans.
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