Attention ! un film qui fera date -au sens figuré et historique du terme.
Historique car Un pays qui se tient sage est le dépositaire salutaire des violences
policières et recueille des propos sur ce sujet brulant, émanant de backgrounds très différents. Un documentaire d’autant plus nécessaire que, non seulement, trop de personnes nient encore les abus policiers, le cerveau broyé par le gouvernement et/ou BFM and co, mais pire : pile quand ledit gouverne-ment tente de faire passer une loi liberticide, demandant à ce que les visages des policiers soient floutés ! Nous nous permettons de relayer ici le texte de la SCAM, société en charge des auteurs documentaires et multimédia, forcément très préoccupée par cette décision sacrilège :
Revenons en à nos moutons, tout sauf moutonniers !
Rappel des faits : David Dufresne s’est fait connaître comme une pierre angulaire de l’underground français et un journaliste émérite. Une des rares personne capable de cumuler en une vie diverses trajectoires qui forcent le respect et la sympathie.
Ainsi,Dufresne ou Davdduf (cf son site https://www.davduf.net/ ) a été à la fois, créateur de fanzines cultes courant 80 (Tant Qu’il y aura du rock, Combo), rédacteur en chef de I-télé, essayiste (écrits sur Brel, l’affaire de Tarnac, une mythique salle de concerts le New Moon…), un des premiers aventuriers du net début 90 (webzine : la Rafale), reporter pour Libération et membre de l’équipe fondatrice du site d’investigation Mediapart…. Enfin, son travail Allô @Place_Beauvau a été récompensé par le grand Prix du Jury des Assises internationales du Journalisme. D’une certaine
façon, même si le chemin de Dav Duf est multiple et engagé, sauf dans les sentiers battus, ce film s’inscrit en ligne droite, cohérente et évidente de son fulgurant parcours.
Après 5 web TV, 4 documentaires TV. Un pays.. est son premier documentaire pourle cinéma. Son propos est d’inviter des citoyens à approfondir, interroger et confronter leurs points de vue sur l’ordre social et la légitimité de l’usage de
la violence de l’état. Un Pays… répertorie une grande partie de vidéos qui lui sont parvenues, témoins en majorité des accidents hyper violents intervenus lors des manifestations des Gilets Jaunes et donne la parole à un panel de gens, aussi large que possible.
Le film questionne cette définition de Max Weber : «l’État revendique le monopole de la violence physique légitime »
Revoir des images que certains continuent à nier et qui sont aussi historiques : la prise de l’Arc de triomphe, la lugubre « modernité » des flashballs et autres LBD éborgnant, infirmisant à tout va est d’une force sans pareil et on a la sensation très forte et glaçante d’être confronté à l’histoire en marche ; une histoire qui fera date et remet au centre, le phénomène trop souvent, moqué, expédié, incompris du mouvement inouï qu’est celui des Gilets Jaunes. Historicité également des moyens de filmage mis en oeuvre.
Ainsi, Dufresne témoigne : « J’ai aussi été marqué par ReDACteD de Brian De Palma : il avait senti la mutation des images, que la guerre en Irak ne serait plus la guerre du Vietnam. que ce n’était pas le seul filmage qui changeait tout, mais youtube, la diffusion à la portée de tous. Sans intermédiaire qui filtre, et décide ce qui est montrable et quand. »
Le même De Palma et toute sa génération avaient été marqués par la guerre en direct : le Vietnam à la TV. Là, c’est une très grave crise civile, documentée live par des courageux anonymes usant de leur hardiesse et de leur téléphone . Les voir envahir l’écran donne le frisson.
Du reste, Dufresne précise : « sans les témoignages de ces gens, le film n’aurait pu exister. A la fin, il leur est dédié. D’un certaine façon, ils réalisent le rêve de Dziga Vertov : une caméra derrière chaque citoyen ».
Nonobstant, les dispositifs auxquels recourt le réalisateur peuvent parfois lasser. L’aller-retour systématique entre les images des violences policières vidéo-projetées et les réactions de deux témoins qui en discutent ; le recours récurrent à la phrase de Weber. Enfin et surtout, alors que nous savons (et sommes reconnaissants de le savoir) d’où vient David D, l’absence totale de synthé nous éclairant sur la parole des intervenants a gêné l’auteure de ces lignes. Ne pas savoir qui parle est frustrant, non pas pour juger suivant le statut social, professionnel, mais pour mieux suivre les propos. Dufresne a souhaité qu’on ne juge pas d’où vient la parole. Pour certains, ça sera un plus, pour d’autres, un manque. Hormis ces quelques bémols, le film est jalonné d’images fortes des manifestations (ou autres violences policières : Mac Do and co), filmées en plan séquence, frontales, juxtaposées à des réactions de deux personnes appréhendées, caméra à l’épaule, dans une sorte d’écrin noir. Cocon de l’interview versus brutalité des faits. Le dispositif fonctionne. Les mots percutent : « les quartiers ont servi de laboratoires pour la justice d’exception », les trois violences recensées par l’historienne Ludivine Bantigny, l’écrivain Alain Damasio qui questionne la légitimité de la violence…La citation la plus énorme nous vient d’un flic qui cite Pasolini : « Je préfère le policier parce qu’il est fils d’ouvrier, que le casseur, fils de notaire » !Enfin, surtout on est marqué par les propos courageux de la citoyenne blessée à vie par les forces de l’ordre : « vous n’êtes dignes ni de ma colère, ni de ma haine »
Une chose est sûre : Un pays qui se tient sage est plus que digne de notre intérêt. Même si l’injonction peut faire peur : c’est un devoir citoyen d’y aller !Une façon, même infime, d’amener sa petite pierre à l’édifice démocratique (menacé) et de retourner voir le film en salles, pour bénéficier des nombreux-et passionnants- débats prévus autour.
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