Si le spectateur attend du scénario des explications rationnelles, il risque d’être profondément déçu tant le film cultive l’opacité de la situation, préférant observer à distance plutôt que dérouler un arc narratif élucidant un récit qui ne basculera jamais tout à fait dans le fantastique pur, l’effleurant constamment. Vladimir Durán infuse à son film une inquiétante étrangeté : les enfants discutent avec leur mère qui s’est volontairement cloitrée dans une pièce. Son absence physique est compensée par son omniprésence verbale. Elle communique tout le temps, comme si au fond tout semblait normal, ce qui ajoute un sentiment diffus de malaise. Que se passe-t-il dans cette chambre, cette matière noire comme la définit le cinéaste lui-même ? Pourquoi la mère ne sort-elle pas ? Est-elle malade ou contaminée ? Autant de questions qui resteront sans réponse dans cet objet arty iconoclaste qui, hélas, à force d’exhiber fièrement son dispositif abscons, finit par tourner en rond, prisonnier de son concept excitant mais piégeant. Adios entusiasmo a tous les défauts d’un premier film, de son ambition à sa petite vanité expérimentale, n’affrontant jamais vraiment le cœur de son histoire, préférant rester à la surface des choses. Le film laisse une sensation d’inachèvement. Ce constat est d’autant plus frustrant que le cinéaste s’avère talentueux à maintes égards. Il se révèle un formidable directeur d’acteurs, un fin dialoguiste maniant l’absurde et un metteur en scène singulier très attentif à  la lumière – souvent en clair-obscur et au cadre, usant par ailleurs d’un format scope étouffant qui écrase littéralement les personnages, accentuant le climat claustrophobe qui règne du début à la fin.

Tourné il y a 6 ans, Adiós entusiasmo mérite d’être vu pour son originalité et son audace, si on aime un cinéma atypique qui se désintéresse de la dramaturgie classique.