Après avoir récupéré les images d’outre-tombe d’un jeune couple dévoré par un ursidé dans Grizzly Man, Werner Herzog s’attelle à reconstituer le périple des époux Krafft, vulcanologues de renom, via des images de profundis.
Katia Krafft (née Catherine Marie Joséphine Conrad le 17 avril 1942 à Soultz-Haut-Rhin, France) et Maurice Paul Krafft (né le 25 mars 1946 à Mulhouse – France) se sont en mariés en 1970, réunis pas un métier et une passion commune, la vulcanologie, dont va en découler une autre, celle du cinéma. En effet, ainsi que l’explique Werner Herzog, leurs aventures autour du globe, en quête de volcans au bord de l’éruption, va progressivement les amener à délaisser les instruments de mesure sismique pour, en ce qui concerne Maurice le maniement des caméras, tandis que Katia privilégie l’appareil photographique et la pose : elle est, avec les volcans, l’héroïne de tous les films de Maurice. Dès lors, leur œuvre filmique sinue entre fiction et documentaire ; c’est dans la nature même de ce médium, ainsi que l’écrit Jacques Aumont dans Limites de la fiction (qui pourrait tout aussi bien s’intituler « Limites du documentaire ») : « tout plan est une trace de son tournage mais, inversement, dès que la caméra tourne, elle change ce qu’elle observe en plan de film ».
Leur quête folle, celle de la capture d’un monde quasi apocalyptique, causera leur perte : ils meurent le 3 juin 1991 aux abords du Mont Unzen (Japon) submergé par un nuage gazeux, cendré et pierreux, ce qu’on appelle une nuée ardente. Le terme a été forgé Alfred de Lacroix, en réponse à l’éruption de la montagne Pelée laquelle, en 1902, secoua La Martinique et la décima furieusement (30 000 morts, soit le cinquième des îliens).
Voilà qu’en 1976, c’est La Soufrière, en Guadeloupe, qui menace d’érupter ; Werner Herzog s’y précipite avec une équipe réduite, afin d’enregistrer des images de fin du monde, dans une démarche qui renvoie à ce qu’il dénomme la conquête de l’inutile. Mais La Vieille Dame n’explose pas ; et Werner, contrairement, aux Krafft, en réchappe et en tire des images merveilleuses ; du cinéma, en somme.
Voilà donc ce qui relie Maurice, Katia et Werner : un feu intérieur (The Fire Within est le titre original du film) qui les pousse à aller filmer, au mépris de tous les dangers. Entre l’art et la vie, ils ont fait leur choix.
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