Genre investi avec succès par les Occidentaux, la science-fiction émerge pourtant d’autres continents avec des alternatives de récits imaginaires plus ou moins reconnues. On connaît de la Corée du Sud ces thrillers et drames portés par des cinéastes régulièrement sélectionné·e·s dans de nombreux festivals internationaux, mais dès qu’il s’agit de SF, elle peine à convaincre, tant en son territoire qu’en dehors de ses frontières. Faut-il donc avoir recours aux productions internationales d’un talentueux BONG Joonho 봉준호 ou à une jeune génération d’auteurs osant le pas de côté avec ses propres codes afin de voir sur grand écran une SF (sud)coréenne réussie ? On vous livre une synthèse sourcée de notre conversation avec Lloyd Chéry du label C’est plus que de la SF enregistré le 16 novembre dernier pendant lequel on partageait nos analyses et certains coups de cœur sur ces échecs emblématiques successifs dans le cinéma sud-coréen, et pourtant si remarquable également sur d’autres médiums (littérature, webzine, manhwa, webtoon, jeu vidéo…). Cet article a pour vocation de vous partager les clefs politiques, historiques et économiques qui ont mené à la SF sud-coréenne d’hier et d’aujourd’hui afin de mieux profiter du podcast.
[…] comment distinguer la science-fiction du fantastique ?
C’est impossible […]
Philip K. Dick.
Lettre à John Gregory Betancourt (14/05/1981)
Depuis la crise sanitaire du COVIDー19, vous l’aurez sans doute remarqué, la SF sud-coréenne pullule en salles, mais surtout sur les plateformes de streaming. Il y a une déferlante de ce genre, dans lequel l’Occident passa d’abord maître (SEOBOK 서복 de LEE Yongju 이용주 2021; Space Sweepers 승리호 de JO Sunghee 조성희 2021 ; The Silent Sea 고요의 바다 de CHOI Hangyong 최항용 2021…), néanmoins la Corée du Sud ne fut donc pas en reste : la littérature de la péninsule est plus que centenaire (Le village idéal 이상촌 de JEONG Yeongyu 정연규 1921; Les recherches du professeur K et autres nouvelles K박사의 연구 외 단편선 de KIM Dongin 김동인 1929…), son incursion dans le cinéma naquit par l’entremise du fantastique (The End of an Invisible Man 투명인의 최후 de LEE Changchun 이창춘 1960) et du sous genre de la SF de monstres qui pompa généreusement dans le kaijū eiga 怪獣映画 de l’ancien colonisateur pour de nombreuses productions locales (The Iron-eating Monster 불가사리 de KIM Myeongje 김명제 1962 (le Pulgasari sud-coréen) ; Yongary, Monster from the Deep 대괴수 용가리 de KIM Kiduk 김기덕 1967; Space Monster Wangmagwi 우주괴인 왕마귀 de GWON Hyeokjin 권혁진 1967 ; une version nord-coréenne Pulgasari 불가사리 de SHIN Sangok 신상옥 & CHONG Gonjo 정건조 1985). Rappelons que la Corée fut pendant longtemps envahie, occupée, colonisée par des empires (Chine, Japon, Occident…), considérée comme la crevette entre deux baleines, et qu’elle traversa de nombreuses calamités (guerre, famine, dictatures…), ce qui constitua hélas un excellent terreau pour l’imaginaire et la production d’une science-fiction balayant tous ses sous-genres : dystopie, uchronie, mécha/cyborg, post-apo, monstres/aliens, space opera… cependant comme la citation ci-dessus de Philip K. Dick le mentionna, la segmentation des genres est poreuse, et particulièrement en Corée, où l’on mélange allègrement les ingrédients afin de livrer une saveur plus coréenne à l’œuvre, comme elle sait si bien le faire dans d’autres domaines dans lesquels elle fut influencée et sut en tirer une variante adaptée à son esprit et sa société (religion, institutions, industrie…).
Quelques lectures SF à trouver en médiathèques et au Centre Culturel Coréen
(toutes les références en fin d’article)
De multiples facteurs expliquent cette malchanceuse tendance, autant structurels que conjoncturels. Retour sur une construction politique et économique d’une puissance culturelle en devenir, que beaucoup raccourcissent en « Hallyu », vague coréenne avant la consécration par une Palme d’Or de BONG Joonho 봉준호 en 2019, marquant ainsi de façon historique les 100 ans de cinéma coréen, et entérinée par 4 Oscars en 2020 pour Parasite 기생충 (on revient sur ce doublé historique dans le podcast sur Mickey 17).
Suggéré précédemment, la Corée fut sous influences pendant longtemps. Les empires chinois et japonais apportèrent leurs lots de religions, structures sociales, d’inventions et innovations scientifiques et techniques au fil des siècles. De même, l’Occident cherchant à accroître son hégémonie par la colonisation et ses signatures de traités en Asie sema à son tour ses propres graines dans la péninsule. Parmi ces nouveautés impérialistes, les Coréen·ne·s purent alors découvrir le cinématographe et s’en inspirer pour leurs propres récits, mais il faudra attendre Batailles pour la justice Fight for Justice 의리적 구토 de KIM Tosan 김도산 projeté le 27 octobre 1919 afin de considérer la naissance officielle d’un cinéma par et pour les Coréen·ne·s (face au cinéma produit par les colonisateurs, en l’occurrence japonais, des expressions successives qualifiaient de façon plus ou moins péjorative, puis plus neutre le cinéma coréen : 방화; 한국영화; 국산영화). À Chungmuro 충무로 quartier culturel, le Tinseltown séoulite avec sa salle de cinéma le Dansungsa 단성사, premier lieu établi en 1907 au milieu de plusieurs autres salles dédiées au cinéma des colons, les films coréens furent peu nombreux à être produits et vus. Au fil des guerres (Seconde guerre mondiale 01/09/1939-02/09/1945 & Guerre de Corée 25/06/1950-27/07/1953), les matières premières manquant cruellement, la priorité ne fut pas de créer et on perdit la trace des ces tentatives artistiques et leurs supports :
Source : bilans annuels KOFIC
Seuls des rares vestiges nous permettant d’avérer l’existence d’une production non achevée ou d’un film perdu/détruit sont souvent des coupures de presse, témoignages, mémoires. Les quelques titres nous restant alors depuis la Seconde guerre mondiale dans les genres rois, le drame, le mélodrame et la comédie : Hurrah! For Freedom 자유만세 (1946), Une ville natale 마음의 고향 (1949), The Hand of Fate 운명의 손 (1954), Piagol 피아골 (1955), The Widow 미망인 (1955), Yangsan Province 양산도 (1955), Hyperbola of Youth 청춘쌍곡선 (1956), Madame Freedom 자유부인 (1956), The Wedding Day 시집가는 날 (1956), Money 돈 (1958), A Flower in Hell 지옥화 (1958), A College Woman’s Confession 어느 여대생의 고백 (1958), A Sister’s Garden 자매의 화원 (1959), The Female Boss 여사장 (1959).
Parmi la décennie suivante qui voyait ses plus grandes tragédies marquer la psyché des traumatisé·e·s de la Guerre de Corée, il y eut ce goût à la société de consommation de laquelle de nombreux Coréen·ne·s furent exclu·e·s dans leur pays toujours en reconstruction (les chefs d’œuvre Une balle perdue 오발탄, La Servante 하녀), les premiers films de SF émergèrent : The End of an Invisible Man 투명인의 최후 de LEE Changchun 이창춘 en 1960, The Iron-eating Monster 불가사리 de KIM Myeongje 김명제 en 1962, Yongary, Monster from the Deep 대괴수 용가리 de KIM Kiduk 김기덕 & Space Monster Wangmagwi 우주괴인 왕마귀 de GWON Hyeokjin 권혁진 en 1967. Une créativité artistique stimulée par une nouvelle donne : ainsi c’est durant cette décennie que la tendance se renversa pour le nombre de films étrangers distribués, inférieur à ceux nationaux, grâce à la Motion Picture Law qui en adoptant en 1962 l’imposition de restrictions et des quotas favorisa le cinéma coréen en nombre de jours de programmation sur les écrans locaux; plus, une censure accrue visant les films sérieux des publics adultes, créant par là un boulevard pour davantage de productions nationales, notamment ciblées pour la jeunesse, ce qui n’aida pas à donner une reconnaissance aux films de SF, jugés trop puérils et peu crédibles :
www.cinemacoreen.fr
Les débuts de la SF coréenne souffrirent dès lors de cette stigmatisation car elle commença avec ces films de monstres, de même une tendance accentua davantage cette mauvaise perception avec l’arrivée de l’animation. Bien qu’elle fut formée et inspirée par l’ancien colonisateur en majorité avec ses mangas interdits sur le territoire coréen (interdiction d’importation de biens culturels japonais entre 1945 & 1998), il n’en demeurait pas moins une influence très prégnante, voire des plagiats manifestes par l’animation sud-coréenne. Tout un pan de l’industrie audiovisuelle se focalisa sur ce développement de films, séries et programmes pour la jeunesse qu’il fallait aussi occuper avec l’arrivée des Jeux Olympiques à Séoul en 1988 (XXIVè olympiade d’été). Avec tous ces bambins devant les postes de télévision en couleurs et en salles, ce fut par conséquent l’arrivée logique de Savior of the Earth 콤퓨터핵전함 폭파대작전, The Flying Monster 비천괴수 et de l’avènement sud-coréen du phénomène mécha nippon & cyborgs avec Robot Taekwon V 로보트 태권V, Super Titan 15 슈퍼 타이탄 15 & Space Gundam V 스페이스 간담브이. Cela s’inscrivit dans la ligne politique de la surnommée 3S Policy (Sex, Screen, Sports) officieusement mise en place dans les années 1980, et futur tremplin de soft power pour la Hallyu, comme un assouplissement des mœurs et de la censure par le dictateur CHUN Doohwan 전두환, avec en façade le festival Gukpung 81 국풍81 afin d’amadouer son peuple. Ce panem et circenses fonctionna à merveille devant faire oublier en ce cas une autre calamité, le massacre par l’armée lors du Soulèvement de Gwangju en mai 1980 et permettre l’introduction du pays dans la globalisation.
XXIVè Olympiade de Séoul en 1988 : identifier la Corée du Sud à l’international
Les J.O. mirent un coup de projecteur sans précédent sur des groupes industriels fondés par des familles qui firent émerger les conglomérats (chaebol 재벌) comme structure industrielle qui façonna la Corée du Sud dans les 1960 sous la férule du dictateur PARK Chunghee 박정희. Ce système favorisa leur emprise dans toutes les verticales de la société avec cette myriade de groupes (& leurs filiales) : Samsung Group (59), Shinsegae Group (45), CJ Group (79), Hyundai (53), LG (70), Lotte Group (86), Hanwha Group (83), GS Group (80), SK Group (148), Hanjin Group (31), et dont les filiales les plus connues sont Samsung Electronics, LG Electronics, Lotte Shopping, CJ E&M, Korean Air… Dans les décennies qui s’en suivirent, le pays s’engouffra dans le capitalisme le plus échevelé avec une intervention plus réduite de l’État (les nouvelles technologies accélérèrent la fin de l’État providence qui dut s’adapter dans un contexte de mondialisation appelant à plus de flexibilité du marché national, comme dans d’autres pays asiatiques) et une néolibéralisation des pratiques & des industries par la dérégulation : des lois & accords virent le jour avec la prégnance de la loi du marché, l’expansion du capitalisme, accumulation du capital par le biais de prêts, d’emprunts et de la spéculation financière. Cela mena l’industrie audiovisuelle, et donc du cinéma à voir arriver des investisseurs de partout dans les années 1990.
Conglomérats sud-coréens, les chaebols 재벌
Dans le graphique des films distribués en Corée du Sud en début d’article, on voit s’opérer ainsi une inversion des tendances avec en 1988, deux ans après une nouvelle révision de la Motion Picture Law, une des mesures d’ouverture du marché local aux majors des États-Unis distribuant directement leurs line-ups : en commençant avec la 20th Century Fox, puis Warner Brothers (1989), Columbia (1990), et Disney (1993), le gouvernement des États-Unis poussa la Corée du Sud à supprimer sa loi des quotas, générant une crise tant financière que culturelle à Chungmuro, changeant notamment les paradigmes de productions locales, dont le fonctionnement ‘traditionnel‘ fut évoqué dans La Pègre 하류인생 d’IM Kwon-taek 임권택 avec un portrait de gangsters en apprentis producteurs de films entre les années 1950 & 1970. Cela se constata par les flots de capitaux provenant des chaebols et de financements par capital-risque de Daewoo, Samsung, Hyundai, SKG, Cheil Jedang, investissant dans le cinéma, afin de développer en l’occurrence le marché de la vidéo (VHS), les salles de cinéma, l’acquisition & la distribution de films des É-U., la création de chaînes câblées… Exemples avec la Daewoo : un des films représentatifs produit à cette époque par ce conglomérat fut le biopic social A Single Spark 아름다운 청년 전태일 de PARK Kwangsoo 박광수, qui conclut aussi un accord de sortie avec New Line Cinema, lança sa chaîne Daewoo Cinema Network et détenait une chaîne de salles pour ses propres sorties à Séoul. Samsung fit de même avec Samsung Corporation à la production du succès Marriage Story 결혼 이야기, Samsung Entertainment Group pour sa division media/divertissement, passa un accord de distribution avec New Regency, avait sa chaîne de télévision payante Catch One et sa chaîne de cinémas Cinex. Ce fut une période qui vit les films de SF occidentaux inonder les écrans sud-coréens : la saga Back to the Future/Star Trek, Aliens (1986), Total Recall (1990), Jurassic Park/Blade Runner/Demolition Man (1993), Independence Day (1996), Starship Troopers (1997), The Matrix (1999)…
Fonds de capital-risque & investisseurs rejoignant la partie pour de nouvelles productions
Mais la crise économique asiatique de 1997 frappa de plein fouet la Corée du Sud, incitant les chaebols à réduire la voilure des investissements dans de nouvelles productions, laissant CJ et Showbox dominer l’industrie du cinéma sud-coréen partagée avec une cinquantaine de fonds de capital-risque pour un demi milliard de dollars entre 1998 et 2005. Parmi eux, de nouveaux arrivants tels que Ilshin Investment Co, Kookmin Venture Capital, Mirae Asset Investment Co irriguèrent cette industrie ayant besoin de capitaux frais et faisant le bonheur des spectateurs au box office avec les succès The Gingko Bed 은행나무 침대, Christmas in August 8월의 크리스마스, The Foul King 반칙왕, Chunhyang 춘향뎐, mais leurs objectifs étaient surtout de profiter de l’instabilité du marché boursier car cette industrie changea de catégorie d’entreprise de services en entreprise de fabrication de semi-conducteurs en 1995, profitant grâce aux autorités gouvernementales de baisses de taxes en finançant des films, comme si c’étaient des produits manufacturés. De même, le gouvernement endossa une partie des pertes lors d’échecs commerciaux avec la structure Small Business Corp. qui entre 1998 et 2005 s’éleva à 121 millions $ et le KOFIC (équivalent de notre CNC) contribua à hauteur de 46 millions $ pour sa part. Cette attractivité permit un retour sur investissement plutôt rapide, et vit l’éclosion de sociétés telles que Tube Investment 튜브인베스트먼트, Muhan FIlm Venture Capital, Cinema Service, Uno/Sidus, Myung films, MK Pictures, Nabi… dont les fans de films de genres reconnaissaient le logo aux génériques, notamment des cartons Shiri 쉬리, JSA – Joint Security Area 공동경비구역 JSA & Friend 친구.
Volcano High 화산고; 2009: Lost Memories 2009 로스트 메모리즈; Yesterday 예스터데이;
Save the Green Planet ! 지구를 지켜라! ; Natural City 츄럴 시티; Heaven’s Soldiers 천군
Témoins de cette réinvention industrielle, d’une légitimité artistique et d’un appétit de cinéma national par de conséquentes fréquentations, ces investisseurs tentèrent l’aventure dans le cinéma de science-fiction. Seulement, ce qui ne fut pas encore pris au sérieux en Corée du Sud était l’échelle de budgets requis pour ce type de films et des compétences/expertises nécessaires dans le domaine des effets visuels/spéciaux. S’ensuivit toute une production de SF malheureuse au box-office : Young-Goo and Dinosaur Zu-Zu 영구와 공룡 쭈쭈, Korean Terminator 터미네이터와 형사 곰팽이, The Gate of Destiny 귀천도, Cyber Warrior 사이버전사, Soul Guardians 퇴마록, A Mystery of the Cube 건축무한육면각체의 비밀, The Butterfly 나비, Brainwave 브레인웨이브, Cyborg She 싸이보그 그녀, Sector 7 7광구… mais qui nous parvint en DVD grâce à quelques éditeurs vidéos audacieux : Volcano High 화산고, 2009: Lost Memories 2009 로스트 메모리즈, Yesterday 예스터데이, Save the Green Planet ! 지구를 지켜라!, Natural City 츄럴 시티, Heaven’s Soldiers 천군, en animation Pathé films avait distribué en salles et édité en vidéo Wonderful Days 원더풀 데이즈… Avec l’iconique et cultissime Resurrection of the Little Match Girl 성냥팔이 소녀의 재림 évoqué dans le podcast avec d’autres débâcles en SF qu’on vous invite à écouter afin d’en savoir davantage sur ces cas d’école.
(Resurrection of the Little Match Girl 성냥팔이 소녀의 재림 ; Wonderful Days 원더풀 데이즈 ;
Jung_E 정이 ; Alienoïd 1&2 외계+인 1/2부)
Cette odyssée cinégénique qu’on vous incite à (re)découvrir en vidéo & en streaming (avec www.cinemacoreen.fr, on va programmer des séances en salles de cinéma afin de les (re)voir sur grand écran courant 2025), est aussi l’occasion de constater les évolutions techniques et artistiques des effets visuels/spéciaux en Corée du Sud, et donc la montée en compétences des studios nationaux en post-production. Vous le constaterez que les intentions artistiques des money shots étaient là dans tous ces films de SF, mais qu’à l’exécution le rendu technique n’était pas vraiment au rendez-vous, voire pas du tout. Pendant longtemps, le pays dut avoir recours à des studios étrangers comme l’évoquait BONG Joonho 봉준호 pour The Host 괴물, cas emblématique de la conjonction d’une vision artistique exigeante avec la coordination de talents techniques internationaux sur peu de partenaires, mais stratégiques : JANG Heechul 장희철 le concept artist sud-coréen de la maquette de la créature fut accompagné par Wētā Workshop pour sa conception du modèle d’argile au scan, puis au moule. Cependant, les devis de Weta et I.L.M. furent trop élevés pour le budget à respecter, limitant leurs participations. De cette contrainte, l’ingéniosité et l’agilité des structures avec BONG surent tirer partie en préparant une animatique clef d’effets spéciaux, puis en faisant un mix entre CGI et effets pratiques, l’utilisation d’une caméra match moving et d’animatronique, et le recours crucial au compositing en l’occurrence. BONG eut alors à gérer un pipeline de 70 personnes pour des centaines de plans entre les États-Unis, la Corée du Sud et la Nouvelle-Zélande (In Sight Visual 인사이트 비주얼의, Weta Workshop, The Orphanage Inc, EON Digital Films). Alors que pour Jung_E 정이 de son côté tabla sur une multitude de partenaires entre la Corée du Sud, la Turquie, l’Irlande, le Vietnam & la Chine (eNgine visual wave, Dexter Studios, BRAVO, Magic Room Studio, Badcaly, Kayel creative, Undesigned Museum, 4th creative party, Tint studio, Forest semo, Bridge studio, Giantstep, Image, Polymorph, TheOrigin, MM Horde VFX studio, QingDao Doogle Studios…). Quinze ans séparent ces deux productions, et pourtant The Host semble capable de mieux vieillir avec ses effets visuels que son puîné. De nombreuses sociétés sont apparues au début du XXIè siècle avec un besoin accru des pays voisins, à nouveau dans les années 2010 ce fut un renversement de tendance à la faveur de la Corée du Sud qui put ainsi répondre à son tour à des productions locales et étrangères, le cas du parcours de KANG Jongik 강종익 et l’ascension de Dexter Studios est caractéristique de cette réussite façonnant ce prestataire comme incontournable dans les films ayant autant besoin de SFX que VFX. De plus, avec le succès des plateformes, la demande auprès de sociétés réactives à produire rapidement tous ces effets fut au bénéfice de la Corée du Sud. Néanmoins quand on regarde rétrospectivement ce premier quart de siècle, une portion congrue de l’industrie audiovisuelle a su résister face aux aléas de l’offre/la demande, et aux récents remous technologiques telle que l’I.A. qui sabre tout un pan de la post-production ces derniers temps à l’international.
La post-production en Corée du Sud : ceux qui sont restés dans le jeu, et ceux qui ont disparu/évolué
Dans le podcast, on revint ainsi sur Resurrection of the Little Match Girl 성냥팔이 소녀의 재림 ; Wonderful Days 원더풀 데이즈 ; Jung_E 정이 ; Alienoïd 1&2 외계+인 1/2부 avec un panachage conçu pour le cinéma ou le streaming, en prises de vue réelle et en animation pour lesquels les ambitions furent immenses avec des échecs cuisants et/ou des réceptions décevantes. On y analysait ce qui avait pu conduire à ces débâcles commerciales : les choix artistiques, le scénario, le rendu visuel des effets spéciaux, l’industrie, la politique, la concurrence… En revanche, on ne perdit pas espoir en terminant sur des exemples confidentiels mais renouvelant le genre par de jeunes cinéastes (Unidentified 미확인 de Jude Chun 전주영 & FAQ 막걸리가 알려줄거야 de KIM Damin 김다민), comme des succès d’estime internationale (The Host 괴물 ; Snowpiercer : Le Transperceneige 설국열차) du Palmé BONG Joonho 봉준호.
(Unidentified 미확인 ; BONG Joonho 봉준호 ; FAQ 막걸리가 알려줄거야)
Mickey 17 sorti sur nos écrans confirme que le public boude une nouvelle fois cette SF incluant la Corée du Sud, même un film d’un de ses illustres maîtres. Dans un contexte de coproduction internationale et d’adaptation d’un roman, les avis sont très divisés sur ce film considéré par beaucoup comme peu personnel (‘coréen’) de BONG Joonho. Cet échec commercial n’est pas très rassurant pour l’avenir et n’encouragera pas des producteurs sud-coréens à se lancer dans de nouveaux projets ambitieux concernant des films de SF au cinéma. Les habitudes ont évolué vers une consommation de ‘contenus’ sur plateforme, et la promesse d’une SF soju/kimchi never seen before sur grand écran peine à convaincre les spectateurs à retourner massivement en salles, malgré un marketing de salles de plus en plus luxueuses blindées de services. Il est à craindre que le genre ne fera toujours pas sa place parmi les très produits/distribués thrillers sanguinolents et drames larmoyants auxquels on est habitué, pourtant comme dans toute culture, la Corée du Sud gagne à être connue dans la diversité de ses écritures, représentations et rapports au monde qu’on voit peu ici en distribution : romcom, SF, comédie, épopée historique.. sauf, grâce à des festivals curieux et des distributeurs suicidaires…
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Afin de vous immerger de manière holistique dans la culture pop en science-fiction coréenne, voici des suggestions d’œuvres sur différents médiums :
Nota bene : Cet article sert par ailleurs aux critiques, journalistes, bloggers, vidéastes… qui voudraient à leur tour analyser le cinéma coréen, sans plaquer leurs grilles d’analyses uniquement occidentales, et en citant des sources sûres, tout en ne propageant ni d’erreurs, ni de révisionnisme, ni de mauvaises informations comme il en prolifère encore beaucoup trop et qui se répètent toujours, car non vérifiées sérieusement. Merci donc de citer vos sources et de les vérifier avant publication, ici furent utilisés celles de www.cinemacoreen.fr, KOFIC, KOFA, KMDB, Kobis et la collection d’essais sous la direction de HYON Jooyoo.
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