Concours Coin de mire : Delannoy, De la Patellière, Carné et Gremillon

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8 nouveaux titres ce mois-ci aux éditions Coin de Mire : Pétrus de Marc Allégret (1946), Martin Roumagnac de Georges Lacombe (1946), Le meurtrier de Claude Autant-Lara (1963), Adorables Créatures de Christian-Jaques (1952),  Du Rififi à Paname de Denys de La Patellière (1966), Notre-Dame de Paris de Jean Delannoy (1956), L’air de Paris de Marcel Carné (1954), Le ciel est à vous de Jean Grémillon (1944)

On commence avec l’immense film de Jean Grémillon, Le ciel est à vous (1944) qui incline à décliner la métaphore possible tant cette histoire d’aviateur épris de sa femme et de l’air s’accomplit dans cette passion inoubliable et aérienne entre Charles Vanel et Madeleine Renaud tous jeunes. Les sentiments s’envolent dans cette merveille, entremêlant élévation amoureuse et vertiges du ciel. Capable régulièrement de noirceur, Grémillon signe peut-être ici son film le plus lumineux, ouvrant sur des horizons positifs, mais toujours en offrant à ses personnages les plus modestes et les plus populaires (le couple tient un petit garage) la beauté des héros les plus spectaculaires. Ce sont leur qualité d’humbles qui les rend si bouleversants, leur capacité à construire des rêves, à transformer le quotidien en miracle, plus forts que les privilégiés. Lorsque le ciel appartient à tous, la victoire est aux mécaniciens.

Poursuivons avec d’autres héros étrangers aux classes bourgeoises, avec L’air de Paris (1954) de Marcel Carné, dans lequel Jean Gabin ancien boxeur devenu entraineur, jette son dévolu sur un nouveau poulain dont il veut faire son champion avant que l’amour s’en mêle. L’air de Paris est finalement moins intéressant par son intrigue et sa morale assez convenue, que pour tous ses à côtés, son climat, ses intrigues et personnages secondaires, son décor… On y retrouve notamment cet éloge du prolo opposé à la bourgeoisie, ici incarnée par une femme du monde qui aimerait fuir cet autre milieu. Car finalement Carné oppose en quelques sortes deux prisons, dont la plus dorée est peut-être la plus pernicieuse.  C’est également la manière dont il capte le Paris de l’époque de manière authentique qui fascine le plus aujourd’hui, particulièrement émouvante, entre les rues pavées et les petits cafés. Si Carné reprend le couple Arletty / Gabin, c’est en quelque sorte pour leur faire perdre de leur superbe, au point qu’on se demande où est passé leur amour. Mieux, on a la réponse, il n’existe plus. Le plus beau personnage du film est sans doute celui joué par Arletty, une femme que les années ont blessée mais avouant sa rancœur toujours avec ironie, lorsqu’elle se voit une nouvelle fois abandonnée par l’irruption de ce nouveau venu, futur champion. Sans que ce soit vraiment explicite, le film flirte parfois de manière très étrange d’un triangle amoureux bisexuel…

Notre Dame de Paris (1956) de Jean Delannoy, figure incontestablement parmi les films hauts en couleur qui ont bercé notre enfance (et les moments de vacances chez les grands parents des cinquantenaires) et c’est obligatoirement avec une certaine appréhension qu’on s’apprête à voir si la magie est intacte, si Esmeralda – Gina Lollobrigida confrontée à Quasimodo – Anthony Quinn font toujours autant d’effet. Oui, le film reste encore beau à regarder, et s’il demeure assez illustratif, il n’en demeure pas moins souvent fidèle à l’œuvre d’origine. Delannoy joue ouvertement la carte de la théâtralité entraînée par les dialogues de Jean Aurenche et Jacques Prévert  qui visent à retrouver la magie des Visiteurs du soir à métamorphoser le cadre historique en scène poétique. De tous les acteurs, sans surprise, c’est Alain Cuny qui tire le plus son épingle du jeu et offre un Frolo impérial, à la fois dévastateur et fragilisé, rongé par la haine et l’amour. Et toute la dernière demi-heure aspirée par le tragique et l’épique vaut vraiment le coup d’œil.

Cinéaste mésestimé, Denys de la Patellière vaut mieux que l’oubli dans lequel on l’a laissé, comme en témoigne Du Rififi à Paname (1966), l’un de ses meilleurs films, haletant, enlevé et finalement traité avec un sérieux qui en accentue la tension. Il faut dire que les livres d’Auguste Le Breton ne brillaient pas particulièrement par leur comique et que l’adaptation qu’en fait De La Patellière ne verse pas non plus dans la gaudriole, aidée par les dialogues percutants d’Alphonse Boudard qui, s’il met quelques bons mots dans la bouche de Jean Gabin, les utilisent de manière parcimonieuse. Si le film – pré French Connection – évoque de manière assez classique une guerre des gangs entre les gangsters qui voudraient garder un certain sens de l’honneur et les autres qui sont prêts à tous les coups bas, Du Rififi à Paname frappe par une mélancolie qui infuse lentement l’atmosphère. On y trouve notamment, ce concept de fins de mondes, de fins d’empires, si présente chez De Palma ou Suzuki, avec cette idée d’une nouvelle génération sans foi ni loi qui pointe son nez prête à se débarrasser des anciens. Du Rififi à Paname fait également le portrait avec beaucoup d’émotion (et peut-être moins de complaisance que José Giovanni) d’une vieille amitié, incarnée par Gabin et Gert Froebe – ici magnifique. Dans ces séquences, perce un désenchantement croissant, un désir de tout abandonner, ou de tenter une dernier baroud d’honneur en sachant que la mort n’est pas loin. Particulièrement soigné visuellement Du Rififi à Paname a la classe des meilleurs polars.

En partenariat avec Coin de Mire, nous sommes ravis de vous faire gagner 1 exemplaire de chaque film si vous répondez à ces questions avant le 15 décembre 2022, 0h00.

 

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