Le week-end de Pâques approche à grand pas et avec lui le grand retour du festival Hallucinations Collectives qui célébrera cette année sa 17ème édition. Entre cohérence, nouveautés et continuité, cette semaine chargée en propositions fortes passées et contemporaines, promet une fois de plus son lot de sensations fortes.
Après une ouverture assurée l’année dernière par Shin Ultraman de Shinji Higuchi, c’est de nouveau l’Asie qui lancera les festivités avec Concrete Utopia de Um Tae-hwa porté par le charismatique Lee Byung-Hun. Sorti l’été dernier en Corée du Sud, passé depuis par le TIFF, le long-métrage arrivera directement sur MyCanal en France. Outre l’occasion rare de le voir dans les meilleures conditions, ce blockbuster local mêlant grand spectacle et thriller à dimension sociale jouit d’une belle réputation et devrait a minima être une démonstration de savoir-faire. On reste en Asie avec la présence en compétition d’En Boucle, nouvelle réalisation de Junta Yamaguchi après Beyond The Infinite Two Minutes (projeté lors de l’édition 2022). Pour celles et ceux qui auraient apprécié son film précédent, sachez qu’il sera de nouveau question de boucle temporelle. Cinq ans après J’ai Perdu mon corps (deux César et une nomination aux Oscars), Jérémy Clapin a la lourde tâche de confirmer les espoirs placés en lui. Avec Pendant ce temps sur Terre, il délaisse l’animation pour s’essayer au film live avec un récit fantastique tourné en Auvergne-Rhône-Alpes, quelque part entre Body Snatchers et Carpenter. A noter que le cinéaste sera présent pour accompagner la séance.
Prix de la Critique du Public au Festival de Gerardmer, When Evil Lurks de Demián Rugna (réalisateur de Terrified, disponible sur Netflix) arrive précédé d’une aura non négligeable. Film de possession, parfois considéré comme le versant sud-américain de The Strangers de Na Hong-Jin, il confronte un petit village rural d’Argentine au démon, dans un élan sombre et violent. On reste sur le continent pour aller au Brésil avec Property de Daniel Bandera, relecture contemporaine de la lutte des classes observant la révolte d’ouvriers agricoles bien décidés à ne pas se laisser faire par leur couple de propriétaires, notamment en séquestrant le mari. On comptera sur Late Night with the Devil de Cameron et Colin Cairnes reprenant les codes et l’esthétique d’un talk-show seventies amené à briller, le tout avec dans le rôle principal David Dastmalchian. Vu dans Prisoners, The Dark Knight ou The Suicide Squad, auteur de bandes-dessinées, scénariste, ce comédien singulier pourrait à près de cinquante ans révéler une nouvelle facette dans la peau de Jack Delroy, un présentateur télé un brin désespéré…
Seize ans et encore jeune, le festival a décidé pour sa grande thématique de l’année, Haro sur l’autorité, de se rebeller et d’envoyer quelques missiles à la bienséance. Quatre films seront chargés d’éreinter la morale, les mœurs et les codes de conduite en tout genre. Themroc de Claude Faraldo, avec un Michel Piccoli monstrueux et méconnaissable, se déroule dans le Paris du début des années 70, à l’aune d’une époque instable et incertaine. C’est dans ce contexte que le héros, après un licenciement aussi absurde qu’injuste, va entrer dans une rage qui n’épargnera personne. Dérangeant et libertaire, le film se fait l’autopsie exacerbée d’un pays en crise, dans un élan barbare et poétique. Plus « léger » et de facto plus fun, le quelque peu oublié Tank Girl de Rachel Talalay, adapte le comics post-apocalyptique d’Alan Martin et Jamie Hewlett. If… de Lindsay Anderson avec Malcolm McDowell (avant Orange Mécanique) observe la révolte d’adolescents dans un pensionnat autoritaire. Une allégorie pleine d’ironie d’une société anglaise inégalitaire et dure qui s’éloigne malicieusement du réalisme pour plusieurs envolées oniriques inspirées. Le documentaire de Kazuo Hara, L’Armée de l’empereur s’avance, complète la thématique.
Comme toujours, Le Cabinet de curiosités sera l’occasion de découvrir ou de redécouvrir sur grand écran, des films rares voire oubliés. Premier long-métrage en tant que réalisateur de Jean-Louis Trintignant, Une journée bien remplie, par un hasard de calendrier, passera au Festival quelques semaines après sa ressortie en Blu-Ray chez Studio Canal. Une remise en lumière bienvenue pour une œuvre longtemps restée rare dans laquelle un homme parcourt la France dans un side-car aux côtés de sa mère multipliant les cadavres au fil de son itinéraire bien établi. C’est étonnamment dans les eaux du cinéma bis que navigue l’acteur du Grand Silence, qui ne repassera derrière la caméra qu’une seule fois par la suite. Un certain Jean-Jacques Beineix effectuait d’ailleurs ses débuts au cinéma en tant qu’assistant de Trintignant. Coscénariste de Salo ou les 120 journées de Sodome, Pupi Avati reste un nom encore trop méconnu. Une injustice que cette édition tentera de réparer avec la projection du dérangeant La Maison aux fenêtres qui rient dans le cadre du Cabinet de curiosités. Il est à noter que le film connaîtra une sortie en Blu-Ray, dans une version remasterisée chez Le Chat qui fume. Autre sortie annoncée chez l’éditeur au félin accro au tabac, Le Cœur fou de Jean-Gabriel Albicocco fera également l’objet d’une séance du Cabinet de curiosités. Film d’amour-fou centré sur deux amants pyromanes, il préfigure en outre, les obsessions de Zulawski, tout en déployant une imagerie impactante. Quand le romantisme se fait meurtrier. Avant La Colline a des yeux, il y eut The Fireworks Woman. Tout juste sorti du scandale de sa Dernière maison sur la gauche, Wes Craven tournait un film porno centré sur la relation interdite entre un frère et une sœur. Un jalon peu connu de la carrière du maître de l’horreur que les Hallus présenteront dans sa version intégrale, invisible depuis sa sortie en 1975.
Réalisateur du jingle des Hallucinations Collectives en 2020, année durant laquelle fut également proposée une rétrospective de ses courts-métrages, Robert Morgan jouit cette année d’une Carte Blanche composée de trois longs-métrages. Il a notamment choisi un film érotique signé par le stakhanoviste du cinéma d’exploitation, Jess Franco. Relecture du mythe de Faust portée par la muse du cinéaste Lina Romay, Les Possédées du diable sera en outre présenté pour la première fois dans sa version intégrale. Les spectateurs de l’édition 2017 se souviennent peut-être d’un Film d’Amour non simulé baptisé Corruption réalisé par un certain Roger Watkins. Ce cinéaste sera de nouveau à l’honneur pour son film le plus connu (des connaisseurs cela s’entend), Last House on Dead End Street. Sur tous les fronts, Watkins tient le rôle principal, celui de Terry un ex-détenu qui se lance dans la réalisation de snuff movies. Précédé d’une réputation aussi crapoteuse que sulfureuse, l’occasion de le voir sur grand-écran ne se présente que rarement… Avis aux amateurs ! Les adeptes de kung-fu, magie noire et surréalisme devraient être servis avec son troisième choix : The Boxer’s Omen de Chih-Hung Kuei. Enfin, cerise sur le gâteau, Stopmotion, le premier long-métrage de Morgan fera l’objet d’une avant-première événement en clôture. Fidèle à sa technique de prédilection, qu’il combine à des prises de vue live, le cinéaste se frotte au genre horrifique tout en livrant un autoportrait déguisé.
L’un des plus grands noms du cinéma d’animation en image par image aux côtés des frères Quay ou Phil Tippett, le Tchèque Jan Švankmajer sera mis à l’honneur à travers trois séances qui lui seront consacrées dans une rétrospective intitulée Le Souffle de vie. Si son adaptation d’Alice aux pays des merveilles (ressortie récemment en salles) demeure son œuvre la plus célèbre, les Hallus seront l’occasion de découvrir sur grand écran six de ses courts-métrages et deux longs intitulés Les Conspirateurs du plaisir et Démence, inspiré d’Edgar Allan Poe.
Temps fort assuré, le traditionnel double programme du vendredi appelé Absurdomanie qui mettra en valeur deux comédie hors des clous, l’une hexagonale, l’autre américaine. Les succès consécutifs de Yannick et Daaaaaali !, ont définitivement assis Quentin Dupieux comme un nom incontournable du paysage de la comédie française. Le festival a la judicieuse idée de rediffuser son premier long-métrage Steak, OVNI hilarant et dérangeant lamentablement vendu comme une énième comédie avec Éric & Ramzy à sa sortie, ce qui contribua a créer un fâcheux malentendu quant à sa qualité (il put malgré tout compter sur le soutien d’une minorité non négligeable de la presse française). « Le dernier arrivé est fan de Phil Collins », « La partie sera bleue », « Pourriture tabagique… » autant de répliques à même de générer d’incontrôlables fous rires pour les spectateurs avertis et les néophytes. Satire d’une société de l’inculture et de l’apparat ou le duo comique le plus bankable des années 2000, séparé dès les premières minutes se réinvente progressivement aux côtés de la crème de la French touch électro (Sébastien Tellier, Kavinsky, Sebastian). Culte outre-Atlantique, Napoléon Dynamite révélait Jared Hess (également réalisateur du fendard Super Nacho avec Jack Black) et Jon Heder, remettait la figure du Nerd au cœur d’un teen movie vingt ans après l’excellent Revenge of the Nerds. Drôle, rebelle et inventif, le film était sorti chez nous directement en DVD. Cette injustice sera réparée le temps d’une soirée, qui s’annonce d’ores-et-déjà fabuleuse !
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GeromeF
le festival Hallucinations Collectives est possible d’etre retrouvé quelque part ?