Plus qu’un livre, Le guide du routard est avant tout un outil ludique pour découvrir sa destination et planifier son séjour. Seulement, pour se distraire dans les presque trois heures de trajet dans l’Eurostar qui vous amène de Paris à Londres, ce n’est pas ce qu’il y a de plus divertissant. Les nouvelles qui composent Londres noir, anthologie présentée par Cathi Unsworth, sauront vous faire passer agréablement le temps en vous faisant découvrir une facette de la capitale britannique qu’aucun guide touristique ne vous dévoilera.Avec ses 17 nouvelles, ce recueil propose une visite dans les plus sombres profondeurs de Londres, cité étendue et cosmopolite, au sein de laquelle les policiers corrompus croisent les marginaux en tout genre. À chaque histoire correspond un quartier, un voisinage que s’approprient des auteurs tels que Ken Bruen, Barry Adamson, Martyn Waites ou Dan Bennett… Des flics véreux aux meurtres rituels en passant par la justice battue en brèche et les guerres de gangs, l’anthologie présente un portrait exhaustif d’une ville rythmée par les sirènes des voitures de police.Une esquisse qui se découpe en quatre parties dont les titres sont tirés de chanson des Clash. Si le roman noir américain se teinte souvent de blues, les nouvelles de Londres noir sont résolument punks et rocks. Et pour cause, beaucoup des écrivains conviés ici sont soit des musiciens soit des chroniqueurs rock pour des magazines comme Mojo. Souvent âpre et sordide, l’anthologie sait aussi être tantôt mélancolique tantôt cruelle et les thèmes de l’exclusion, de la peur de l’autre et de la solitude s’invitent parmi ses pages.
Londres noir est un constat sans concession de l’évolution d’une ville et des préoccupations de ses habitants. Certaines nouvelles situées dans les années 70 évoquent les meurtres en série alors que les plus contemporaines parlent de gloire passées, de mal être identitaire et autres inquiétudes politiques. Dans d’autres textes, les intrigues policières laissent la place aux conflits sociaux et générationnels comme dans la très belle nouvelle de Jerry Sykes, L’île aux pingouins. Chez Joolz Denby et John Williams, Londres semble être aussi le théâtre idéal pour conter des histoires de quête illusoire de gloire ou de tragiques destins de star déchue. L’immense capitale est aussi un carrefour où se croise prêtres ambigus et autres psychiatres siphonnés. Comme si les parias en tout genre, qui ont ici la part belle, s’y donnaient rendez-vous. À travers tous ces textes se dessinent une cartographie de Londres où chaque quartier, de Soho à Elephant & Castle, est une impasse, les auteurs ayant choisi de ne pas accorder de place à l’espoir. Londres noir est la retranscription crue, sans fausse pudeur d’une réalité comme savent le faire les Anglais et où Londres y est dépeint comme une ville sale, violente, dangereuse, véritable creuset dans lequel chacun essaie de survivre, souvent au détriment d’autrui.
Enfin, vous arrivez à la gare de St Pancras, dans le quartier de King’s Cross, décor de Trouble is a lonesome town, la nouvelle de Cathi Unsworth. Vous êtes assailli par la foule grouillante, les sirènes des voitures de police vous percent les tympans et les devantures des magasins pour touristes et des pubs, en verre et briques rouges, n’arrivent plus à masquer ce qui se cache derrière les apparences…
Cathi Unsworth présente Londres noir (Folio Policier, Gallimard).
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