Résumé de l’épisode précédent : on en a bavé ! De la sueur plein les aisselles, des gunfights crapuleux, la radio qui hurle des insanités et une bande de forcenés dans une forteresse assiégée… Mais ça ne faisait que commencer, car aujourd’hui Zorn, en bon docteur maboule, va expérimenter deux nouvelles façons de réanimer la musique. Pas question d’improviser pépère ni de faire des trilles avec le petit doigt, non, on va batailler comme des guérilleros avec un nom de code : Cobra. Puis, comme on est pas du genre à jouer de l’orgue de barbarie, on va te court-circuiter la machine, mettre un peu de jus dans l’électricité, te ventiler tout ça façon puzzle à tonton. Il sera donc question de deux monstres : les « Game pièces » (pièce-jeu littéralement) et les « File cards pieces » (composition par fiches), deux autres grands fondamentaux zorniens. Attention, 5.. 4.. 3.. 2.. 1.. ça commence.
Autre « pièce » clef dans le répertoire zornien, Cobra n’est pas une composition mais un dispositif de jeu qui permet d’improviser en grande formation sans avoir une structure de morceau préalablement établie (Zorn les nomme « Game Pieces »). C’est un ensemble de signes de main ou bien des cartes, que les joueurs ou un « prompteur » à leur tête, montrent à tous les musiciens afin d’infléchir le jeu collectif, de le parasiter, ou de le morceler en petites unités d’instrumentistes. Et musicalement, cela donne quoi, me direz-vous ? Hé bien, quelque chose d’assez anarchique voire de franchement chaotique, désarticulé par endroits, mais qui peut aussi comporter de beaux moments d’interaction. Cobra est davantage un mode de jeu destiné à l’improvisation collective en concert qu’un objet musicalement fini. Pour concevoir cette sorte de « Monopoly » hystérique pour improvisateurs, Zorn a puisé son inspiration autant dans les sports populaires (baseball, hockey…) que dans des stratégies de guérilla, mais aussi dans les préceptes de John Cage sur l’aléatoire musical et le lâcher prise du compositeur. Cobra est donc, plus qu’une œuvre, un moment d’invention, fascinant à défaut d’être entièrement compréhensible et toujours audible, et les albums qui le joue en enregistrent le témoignage. Bien évidemment, Cobra a eu une incidence sur les autres albums, car à chaque fois qu’il est question d’insérer des moments d’improvisation ou tout simplement de diriger les musiciens, les techniques de jeu par signaux ont pu être réutilisées.
George Pan Cosmatos, « Cobra », 1986
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