Une vraie exposition sur les fausses informations avec de vrais artistes qui racontent de fausses histoires…
Véritables « stars » de ces temps troublés passés en Pandémie, les Fake News se répandent depuis des années à vitesse grand V et questionnent notre tendance à « consommer » l’information sans prendre le temps de l’interroger. Virtuelles, virales, mais aux conséquences bien souvent désastreuses, les fausses informations inspirent désormais les artistes qui, à grands renforts de détournements, nous mettent en garde contre les images manipulées et les conséquences de leur partage compulsif.
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Les fake news ne datent pas d’hier.
Qu’il s’agisse du célèbre cliché représentant le général Ulysses S. Grant sur son cheval à City Point en pleine guerre de Sécession (1902) ou bien encore des effacements intempestifs sur les photos officielles de Mussolini (1926), Staline (1934) et Mao (1976), les montages photographiques n’ont pas attendu l’arrivée du logiciel Photoshop en 1990 pour servir les idéologies politiques du monde entier ainsi que les ambitions mercantiles des grandes marques de cosmétique et de prêt-à-porter.
Ulysses S. Grant (avant et après photomontage) (1902)
Mais c’est bien évidemment avec l’émergence des réseaux sociaux et le partage hallucinant des données qu’ils permettent (100 millions de photos et de vidéos sont ainsi publiés chaque jour sur Instagram), que les fake news ont fait une entrée fracassante dans nos vies, jusqu’à faire partie de notre quotidien aujourd’hui. Outils prisés des complotistes de tout bord, les infox se répandent comme des trainés de poudre que rien n’arrête. Elles ébranlent jusqu’aux chefs d’état (le Pizzagate qui suggérait l’existence d’un réseau pédophile au sein du cabinet de campagne démocrate, n’épargna pas Hilary Clinton lors de la présidentielle américaine), qui vont parfois jusqu’à les utiliser eux-mêmes dans le but de servir leurs propres intérêts (ce n’est peut-être pas un hasard si Donald Trump se retrouve sur l’affiche de l’exposition …).
La pandémie de COVID-19 n’est pas non plus avare en exemples, les observateurs parlant d’ailleurs d’infodémie pour évoquer l’épidémie spécifique de fausses nouvelles ayant dévoyé jusqu’à la défiance, la parole scientifique sur le SARS-CoV-2 : le virus pourrait être détruit grâce à la pulvérisation de chlore, l’Institut Pasteur aurait créé le virus, Bil Gates voudrait profiter de la vaccination pour implanter des puces sous la peau des vaccinés et l’activer par la 5G… Plus que jamais les Fake News sont d’actualité, raison supplémentaire pour se prémunir de leurs effets délétères.
Une exposition au cœur de l’actualité.
Parce que les infox impactent tous les domaines – de la politique en passant par les sciences – et qu’elles déstabilisent jusqu’aux démocraties les plus modernes, il n’en fallait pas plus pour que des artistes de tout bord (dessinateurs de presse, plasticiens, vidéastes, etc.) s’emparent du sujet pour proposer un « imaginaire artistique » susceptible de sensibiliser le public sur l’importance de l’usage raisonné et critique de l’information.
Serti dans un évocateur écrin vert (le même « vert 255 » que celui utilisé pour les incrustations des effets spéciaux), l’exposition « Fake news, art, fiction et mensonge » propose une déambulation thématisée (« Fabrication », « Diffusion », « Risques et remèdes ») parmi les œuvres d’une vingtaine d’artistes. Ce voyage en terre virale débute par l’histoire des Yes Men qui, une semaine après l’élection de Barack Obama en 2008, ont diffusé à plus de 80 000 exemplaires un faux numéro du New York Times n’annonçant que des bonnes (et fausses) nouvelles : fin de la guerre en Irak, gratuité des frais de scolarité, instauration d’un salaire minimum… En proposant une réalité biaisée à leurs lecteurs, Andy Bichlbaum et Mike Bonanno (pseudonymes) entendaient dénoncer le traitement univoque de l’information par les médias et la passivité de leur réception par le grand public.
Les très populaires et inquiétantes Deep Fake, ces vidéos mettant en scène des personnalités (politiques, artistiques, etc.) énonçant des propos qu’ils n’ont jamais prononcés par l’intercession d’une intelligence artificielle, sont également mises à l’honneur dans l’œuvre de Bill Posters et Daniel Howe qui voit entre autres David Zuckerberg (créateur de Facebook), Morgan Freeman, Marina Abramović ou bien encore Kim Kardashian nous vanter les louanges de l’organisation fictive S.P.E.C.T.R.E. et les avantages de la manipulation des DATA (rien que ça).
Tweets, publications, partages, clics, scams… toutes les ficelles des fake news et leurs conséquences n’auront plus de secret pour vous lorsque vous aurez refermé la porte de cette exposition essentielle. C’est d’ailleurs toute la force de cette déambulation que de décaler notre point de vue sur le phénomène en nous obligeant à sortir notre nez de nos écrans pour emprunter le chemin d’un art qui ose et interroge les mécanismes numériques de notre société.
Au-delà de l’art…
L’exposition ne se contente pas de proposer la vision d’artistes sur le sujet, elle convoque également de nombreux scientifiques qui décortiquent, ensemble, les tenants et aboutissants du phénomène. Les fake news génèrent-elles de l’argent ? Que font les réseaux sociaux pour éradiquer la dissémination des fake news ? Un contrepoint bienvenu permettant la mise en perspective des œuvres présentées. L’exposition se termine d’ailleurs par un bien violent retour à la réalité avec le rappel très prosaïque des règles à suivre pour décrypter les informations qui circulent sur internet.
Avec cette exposition « Fake News : art, fiction, mensonge », la Fondation EDF mobilise le point de vue d’artistes pour affuter notre regard sur les grands enjeux sociétaux contemporains. Un expérience qui laisse des traces et des impressions… à partager sur les réseaux sociaux !
L’exposition « Fake News : art, fiction, mensonge » est à découvrir à la Fondation EDF jusqu’au 30 janvier 2022.
Pour aller plus loin : « Le 1 Edition Spéciale : Fake News, mensonges et vidéos ».
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